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25 / 10 / 2023 | 163 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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« Le mouvement mutualiste ne doit pas être impulsé par quelques grands groupes » - Philippe Mixte, Fnim

Philippe Mixe, vous présidez la Fédération nationale indépendante des mutuelles (*) depuis plus de 12 ans et vous avez annoncé que votre présidence s’achèvera en décembre prochain. C'est l’occasion de faire à la fois un bilan et un tour d’horizon des enjeux pour les mutuelles.


Que retenez-vous de ces années ?

 

Ce qui me vient tout de suite à l’esprit est qu’il n’y a pas de fatalité. En 2011, pratiquement toutes les mutuelles à taille humaine étaient convaincues que leur avenir était mis en cause. Et chaque évolution de leur environnement les confortait dans cet état d’esprit. Ces douze années ont donc été des années de combat.

 

La liste est longue, il me semble ?

 

Effectivement. Le plus emblématique a été celui de Solvabilité II qui nous a beaucoup occupés et mobilisé une énergie considérable. Notre force, alors que notre équipe est extrêmement réduite, a été d’avoir été remarquablement bien accompagnés. Ce qui nous a permis de décortiquer la directive jusqu’au moindre mot. De ce fait, nous avons pu exprimer la voix et les inquiétudes des mutuelles et d’obtenir, à l’occasion de la révision de la directive un infléchissement significatif de la position de l’EIOPA.


Et je ne peux pas ne pas citer le dossier des clauses de désignation, un combat mené par l’Apac avec le soutien actif de la Fnim. La censure de ces clauses a redonné un espace de liberté aux mutuelles… Beaucoup d’autres dossiers ont suivi.

 

Ce qui vous a le plus choqué ?

 

Peut-être parce que je suis juriste, ce qui m’a le plus étonné, voire plus, est la démarche systématique de la France à sur-transposer les textes européens. Ces derniers sont déjà contraignants pour les citoyens et les structures. C’est encore plus grave lorsque nos gouvernants amplifient les mesures prises par l’Union Européenne, mesures qu’ils ont par ailleurs approuvées à Bruxelles.

 

De l’avis de beaucoup, vous avez imposé la Fnim comme un interlocuteur sérieux dans les échanges sur le système de santé. Un commentaire ?

 

D’abord une précision : en tant que président fédéral, je suis le porte-parole de l’ensemble des mutuelles adhérentes. Lorsque j’exprime une décision, c’est porté par la volonté de nos responsables et élus. Chaque fois que possible, je mets en avant les atouts de la démocratie mutualiste. Parce que c’est une réalité pour nous.


Alors effectivement, la Fnim s’est imposée comme une structure représentative. C’est d’abord le travail constant qui a été réalisé. Nous n’avons jamais accepté de ne pas traiter un sujet qui posait des problèmes au motif de notre taille modeste. C’est d’ailleurs tout le contraire : nous avons traité systématiquement ces dossiers parce que nos mutuelles à taille humaine attendaient de nous ces interventions.

 

Mais l’action fédérale ne se limite pas à la représentation politique ?

 

C’est évident. Cette représentation peut être perçue comme la partie émergée d’un iceberg. J’aime dire que la Fnim est devenue la fédération de l’innovation mutualiste. L’action fédérale a été intense et diversifiée au bénéfice des mutuelles. D’abord, nous avons répondu aux exigences de compétences de l’ACPR à l’égard de nos élus en renforçant notre offre de formation qui a été structurée autour de l’UGM-OPERA qui, rappelons-le est aujourd’hui certifiée Qualiopi.
 

L’innovation, nous l’avons également traduite en son temps avec la création de l’UGM-ACS, unique solution fédérale pour répondre au nouveau cadre de l’aide complémentaire santé. Sans cette solution, les petites et moyennes mutuelles n’auraient eu comme seul choix que d’opter pour l’abandon de ce segment, ou de rejoindre les gammes labellisées proposées par de grands groupes mutualistes. Nombre de mutuelles ayant fait ce choix sont désormais fusionnées ou intégrées dans ces groupes.

 

Et l’innovation technologique ?

 

Nous avons également été très présents sur ce terrain. Par exemple, nous avons construit notre propre système pour rendre la DSN accessible. Plus près de nous, avec Opéra Innovation, nous avons initié la construction d’un outil technique permettant d’accéder à la digitalisation des métiers et des gammes, comme nous le propose désormais Today qui a déjà obtenu de très beaux succès en santé collective.

 

Abordons la question des enjeux d’avenir pour les mutuelles ?

 

On en connaît certains mais d’autres nécessiteront beaucoup de réactivité et d’agilité. Pour cela, la Fnim a tous les atouts : toujours à l’affut, elle n’est pas dotée d’une infrastructure sclérosée.
 

L’arrivée de nouvelles règlementations européennes comme la CSRD sur les pratiques d’économie responsable apporteront rapidement de nouvelles contraintes déclaratives. De même, le risque cyber doit être pris en compte, comme nous le demande la règlementation DORA. Sans parler de l’intelligence artificielle ou la lutte contre les fraudes. Enfin, au plan politique, il faudra continuer à mettre la pression pour que nos mutuelles soient écoutées et que le mouvement mutualiste ne soit pas impulsé par les quelques grands groupes que l’on connait.

 

Et en ce qui vous concerne ?

 

Voilà plus de 40 ans que je me suis engagé dans la vie mutualiste et je compte bien poursuivre. D’abord au sein de la mutuelle Just. Ensuite, bien sûr auprès de la Fnim qui pourra toujours compter sur mes quelques compétences.

 

(*) Pour plus d'infos sur la Fnim :  https://www.fnim.fr/

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