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09 / 12 / 2021 | 110 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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« Le CESE a un rôle important à jouer pour réconcilier les Françaises et les Français avec la fabrique de la décision publique » - Thierry Beaudet

Entretien avec le nouveau président du Conseil économique, social et environnemental, Thierry Beaudet.

Vous avez été élu président du Conseil économique social et environnemental ; quelle est votre feuille de route ?

Renouvelé et réformé, le CESE a démarré sa nouvelle mandature dans un moment particulier, marqué par les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire. Beaucoup de nos concitoyens ne se sentent ni écoutés, ni suffisamment représentés.


Le CESE a un rôle important à jouer pour réconcilier les Français avec la fabrique de la décision publique. Je l’ai dit dès ma prise de fonction, je forme le vœu d’un CESE qui soit à la fois efficace pour les pouvoirs publics et utile à la démocratie, un CESE qui cultive le sens du dialogue, sa spécificité et son sens du futur.


Je souhaite aussi un CESE pleinement engagé dans le débat public, ouvert et en prise réelle avec la société pour que les sujets du CESE soient les sujets qui font l‘avenir. Ma première action en tant que président du CESE a été, au sein des formations de travail, de demander d’identifier, chacun dans ses champs de compétences, les défis que notre pays devra relever à l’horizon d’une génération.


Nous avons confronté ce travail aux visions des responsables des organisations représentées au CESE, réunis ici pour la première fois et qui ont partagé ce qui leur paraît prioritaire pour un futur souhaitable. Ces travaux ont servi de socle à la définition de nos orientations stratégiques pour la mandature.

 

Quels sont les grands axes de ces orientations stratégiques ?

Nous avons identifié trois grandes familles d’enjeux autour desquelles nos travaux vont s'organiser. En premier lieu, les enjeux de résilience pour une société plus inclusive. C’est la nécessaire cohésion sociale et territoriale. C’est par exemple la question de l’accès aux services publics pour tous et partout sur le territoire.
 

Ensuite, les enjeux des grandes transformations, c’est-à-dire toutes celles qui vont modifier nos manières de travailler, d’apprendre, de se déplacer, de produire et de consommer. Je pense par exemple aux révolutions technologiques, de mobilité ou encore à la mutation de certains métiers. Enfin, la troisième famille d’enjeux est celle des grandes transitions.
 

La question à laquelle nous allons essayer de répondre est celle de la manière d’orienter notre modèle productif pour qu’il réponde au défi écologique, en assurant notre prospérité commune, sans laisser personne sur le bord du chemin. Enfin, nous avons souhaité rappeler dans nos orientations stratégiques qu’aucune des crises que nous traversons ne se réglera sans l’Europe et sans une coopération internationale.

 

La loi organique du 15 janvier 2021 a réformé le CESE. Quelles évolutions a-t-elle entraînées ?

Elle a donné naissance à un nouveau CESE. La première évolution concerne la composition de l’institution et 175 conseillers siègent désormais au CESE. Les membres sont issus de l’entreprise, des syndicats, du secteur associatif, des organisations de jeunesse ou d’organisations engagées pour la préservation de l’environnement. Cette mandature a vu de nouvelles organisations arriver, faisant de notre assemblée un miroir plus juste de la pluralité des acteurs qui agissent tous les jours dans notre société. Je pense aux acteurs de l’économie nouvelle et du numérique ou encore à ceux qui agissent en faveur d’un monde du travail plus inclusif. Au-delà de sa composition, la loi a profondément modifié les missions du Conseil économique, social et environnemental.


La loi conforte le CESE comme assemblée des organisations de la société civile tout en lui demandant d’enrichir ses travaux avec la participation du public. La loi fait du CESE le carrefour de la consultation citoyenne. La participation citoyenne peut prendre plusieurs formes, définies en fonction des problématiques traitées. Cela peut être l’organisation de consultations en ligne et de conventions citoyennes, comme cela a été le cas pour la convention citoyenne pour le climat. Le CESE pourra également directement associer des citoyens tirés au sort à ses travaux. Ils travailleront aux côtés des conseillers sur certains avis. C’est le dispositif que nous avons mis en place pour traiter la question de l’abstention des jeunes par exemple, sur laquelle nous avons été saisis par le Premier Ministre. Enfin, la loi facilite la possibilité pour les gens eux-mêmes de saisir le CESE par voie de pétition. Autant de façons d’augmenter la compréhension des enjeux sur lesquels nous travaillons et d’enrichir l’expertise technique, de terrain et du vécu des individus.

 

Quel regard portez-vous sur la situation actuelle du pays ?

J’identifie trois défis majeurs : un défi écologique que plus personne ne peut ignorer, un défi économique et social alors que la crise a plus durement touché les plus fragiles et enfin un défi qui traverse tous les autres, celui d’une intensité démocratique en berne. Mais d'où je suis, j’observe une société qui a envie de faire et qui se prend en main. L’inquiétude n’a pas laissé place à l’apathie. L’éloignement des urnes constaté à chaque élection n’est pas synonyme de désengagement pour autant. Il est urgent de passer d’une démocratie par spasmes, dans laquelle l’élection présidentielle est finalement le seul vrai rendez-vous, à une démocratie plus continue. Le CESE fait partie des lieux privilégiés où le dialogue démocratique peut vivre. C’est un lieu de coproduction de solutions.

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