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29 / 12 / 2025 | 19 vues
Christine Fourage / Membre
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EFREI : Dérive immobilière d’un Etablissement d’Enseignement Supérieur Privé d’Intérêt Général (EESPIG) ?

À EFREI l’investissement immobilier bat son plein :
 

  • À Villejuif, inauguration le 18 décembre de « New Republic » soit 4.600 m2 sorti de terre et aménagés de façon spectaculaire comme indiqué au communiqué de presse.
  • À Bordeaux est prévu un agrandissement pour rejoindre un chai de 4.700 m2 dans un quartier prisé.
     

Pour son directeur général, considérant le passage de 1.600 étudiants en 2015 à 5.800 dix ans plus tard, « Ce site s’inscrit dans une stratégie réfléchie qui vise à consolider et à moderniser nos campus à Villejuif et à Bordeaux, tout en accroissant nos liens avec les acteurs locaux et régionaux – institutionnels, professionnels, associatifs … Selon la direction, ces projets immobiliers sont au cœur de la stratégie de  développement de l’Efrei : il  « vise en fait à garantir notre indépendance de tout fonds d’investissement ou actionnaire, et notre non-lucrativité – car nous réinvestissons toutes nos recettes dans notre projet pédagogique et nos infrastructures. Notre plan stratégique et nos grands axes de développement vont dans ce sens. » (1)

 

Ces deux points, avancés par la direction, méritent de s’y attarder. Le développement exponentiel du secteur de l’enseignement supérieur privé, lucratif ou non, soutenu par la manne de l’alternance arrive à son terme avec une concurrence exacerbée, la baisse démographique et la fin de « l’open bar » des subventions publiques (voir le Rapport CTI en date du13 mai 2025).

Le prétendu statut « non lucratif » d’Etablissement d’Enseignement Supérieur Privé d’Intérêt Général (EESPIG) peut s’interroger à l’aune de la capitalisation immobilière via des SAS et autres Holdings (dans le cas d’EFREI : SAS RB AMYOT, SASU CHAI RBA et SAS CHAI  EFREI). Hormis le versement de dividendes, une SAS dont l’actionnariat est confidentiel autorise la rémunération du dirigeant tandis que la SASU permet au dirigeant « assimilé salarié », à l’associé unique de transmettre ses titres comme bon lui semble. Le caractère non lucratif d’associations et a fortiori d’EESPIG adossés à des sociétés commerciales doit être remis en cause.

 

De tels investissements ne laissent pas de nous inquiéter. On connaît trop bien la chanson qui peut mener à la dégradation des conditions sociales des personnels et de celles de l’enseignement voire à des difficultés économiques insurmontables. L’investissement immobilier peut être un moyen de réduire la valeur ajouté, de dissimuler les profits et ainsi de justifier la « modération salariale » et/ou le versement d’une participation réduite à la portion congrue. Sans oublier la demande consécutive de toujours plus d’efforts aux équipes avec réduction drastique des moyens à force « mutualisation », « réforme pédagogique » et autre « digitalisation » accompagnée du dernier mantra à la mode « IA ». C’est aussi un risque économique majeur pouvant conduire à la perte de contrôle d’une institution voire à sa faillite surtout quand le nombre d’étudiants espéré n’est pas au rendez-vous pour remplir l’accroissement des mètres carrés et rembourser la dette consacrée à l’acquisition du capital immobilier. L’augmentation des frais de scolarité n’est pas exponentielle surtout quand, actuellement, les inscriptions sont à la baisse et que les frais de fonctionnement sont à la hausse.

 

Ceci n’est pas une vue de l’esprit, des associations alors détentrices du label EESPIG, sont aujourd’hui — suites aux dérives de leur gestion financière et folie des grandeurs immobilières — contrôlées par de grands groupes internationaux telles emlyon (Galiléo) et ICN (GEDU) avec perte du précieux label. ESEO, autre EESPIG, est aujourd’hui dans la tourmente tandis qu’une institution historique comme ETSUP, fondée en 1917, a connu sa liquidation judiciaire en juillet dernier. Voilà ce qui peut arriver dans notre secteur lorsque l’on cède, à l’exemple des grands groupes financiarisés, aux sirènes de l’immobilier, à une politique de marque s’inscrivant dans la forme architecturale (l’image) au détriment du fond (la qualité de l’enseignement).

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