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05 / 06 / 2020 | 123 vues
Christian Grolier / Abonné
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Renforcer la négociation collective dans la fonction publique ou encourager le syndicalisme d’accompagnement ?

Le rapport pour « renforcer la négociation collective dans la fonction publique » vient d'être remis aux organisations syndicales représentatives (*). Les trois rédacteurs choisis par le gouvernement sont un président de section du Conseil d'État, un inspecteur général des finances et un membre du CESE issu de la délégation de la CFDT.
 

Pour notre fédération, il est aberrant qu’un représentant syndical puisse participer à un rapport dont l’objet est la rédaction d’une ordonnance prévue par la loi de transformation de la fonction publique unanimement rejetée par les organisations syndicales de fonctionnaires. Sans préjuger des choix du gouvernement mais tout en relevant l'enthousiasme du Secrétaire d'État à la fonction publique face aux propositions du rapport, nous constatons le changement radical qu'il pourrait induire dans la fonction publique.
 

Inspiré du secteur privé, ce rapport se présente en deux grands axes.
 

  • Le premier est de donner une portée juridique aux accords dans la fonction publique.
     

Jusqu'à aujourd'hui, les accords ou protocoles ne sont que des déclarations d'intentions car l'employeur public décide de manière unilatérale de leur application ou pas. Les accords actuels n’ont donc pas de valeur juridique ni de force contraignante. Un agent ne peut donc pas contester la non-application d'un accord devant le juge administratif.
 

Cela s'explique notamment par le fait que les fonctionnaires sont dans une situation réglementaire et statutaire fixée par le statut général des fonctionnaires.
 

En voulant imposer des accords opposables aux employeurs publics pour certains thèmes, ce rapport contractualise davantage la relation à l'employeur au détriment des garanties collectives. Pour autant, il ne propose pas d’aller aussi loin que dans le secteur privé, où la négociation est obligatoire et peut même entraîner des pénalités pour l’employeur si elle n’est pas tenue.
 

Finalement, l’employeur public reste seul maitre à bord, sous prétexte de la mutabilité et de la continuité du service public. De plus, il exclut du champ des futures négociations des sujets importants comme les carrières.
 

  • Le second axe est la volonté d'intégrer les organisations syndicales à l'appareil d'État.
     

À de multiples reprises, le rapport stigmatise les syndicats contestataires qui pourraient ainsi rentrer dans le rang si on leur faisait porter la responsabilité d'un échec en refusant l'accord. L’exemple de PPCR est régulièrement cité pour opposer les syndicats « responsables et raisonnables » qui avaient signé ce protocole et les syndicats « contestataires » qui auraient eu cette posture, sachant que l’administration allait quand même mettre l'accord en place.
 

Cette interprétation méconnaît le fonctionnement des organisations syndicales. Dans notre organisation syndicale, les décisions sont prises après consultation des instances et en tenant compte de nos résolutions de congrès, pas en fonction d’un éventuel comportement de l’employeur.
 

Une phrase résume bien l’intention des rapporteurs (page 23) : « cette responsabilisation des partenaires sociaux qui deviendront, dans une certaine mesure, comme les co-gestionnaires et co-responsables de l’accord ».

 

  • D'autres pistes sont abordées.
     


Des accords locaux pourraient être signés en appui d'accords nationaux et l'agenda social pourrait être le fruit d'un accord, les thèmes de négociations fixés à l’article 8 bis du statut général des fonctionnaires pourraient, par exemple, être élargis aux moyens dévolus aux organisations syndicales.
 

Cette nouvelle étape dans le dialogue social tend à vouloir transformer les interlocuteurs sociaux en partenaires sociaux, sous prétexte que nous aurions des intérêts communs avec les employeurs publics.
 

C’est oublier un peu vite que ces mêmes employeurs gèlent nos salaires depuis dix ans, baissent nos pensions avec une politique salariale en faveur de l’indemnitaire au lieu de l’indiciaire, ralentissent nos carrières et dégradent nos conditions de travail avec les suppressions de postes et restructurations continues.
 

Notre organisation syndicale revendique son indépendance syndicale et ne s’inscrira pas dans une quelconque cogestion avec les employeurs publics.

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