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10 / 01 / 2020 | 37 vues
Michel Berry / Abonné
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Pour en finir avec les passoires énergétiques

L’efficacité énergétique des bâtiments représente 40 % du gisement potentiel des économies totales d’énergie en France, mais on n’en parle guère. Les médias mettent l’accent sur les énergies renouvelables et les normes en vigueur les plus dures portent sur le bâtiment neuf. Améliorer l’efficacité énergétique des logements anciens n’est donc pas une urgence politique.
 

Pourtant, c’est un domaine où l’on pourrait agir efficacement pour le climat, d’une façon qui aurait des retombées sociales positives.
 

C’est le constat fait par Simon Pirmet et Romain Roussel, deux ingénieurs des mines dans le cadre de leur mémoire de fin d’études.(1)  Ils proposent un plan d’action reposant sur sept mesures, qui ne demandent pas de déploiement législatif complexe, ne seraient pas très onéreuses et dont certaines pourraient provoquer un électrochoc salutaire...
 

Le constat :
 

Dans le domaine du bâtiment résidentiel, qui représente 30 % de la consommation d’énergie finale et 25 % des émissions de CO2 françaises, la France a adopté en 2017 un grand plan de rénovation énergétique, avec cinq objectifs principaux :
 

-rénover 500 000 logements par an ;

-réduire de 15 % la consommation énergétique des logements d’ici 2023 ;

-rénover toutes les “passoires énergétiques” du parc privé d’ici 2025 et celles du parc social d’ici 2022 ;

-réduire de 28 % la consommation énergétique finale des bâtiments d’ici 2030 ;

-rénover l’ensemble du parc de bâtiments pour qu’ils deviennent basse consommation d’ici 2050.

 

Ces objectifs environnementaux s’accompagnent d’un objectif social de lutte contre la précarité énergétique, les ménages les plus démunis étant surreprésentés dans les logements les moins bien isolés.

 

Pourtant en France, comme dans la plupart des autres pays européens, le taux de rénovation du parc immobilier est à peine supérieur à 1 % par an depuis plusieurs décennies et les études de l’ADEME montrent que trop peu de rénovations sont thermiquement performantes. La rénovation énergétique du bâtiment, sujet en apparence très consensuel et considéré comme important, n’est jamais vraiment prioritaire dans les actes politiques ! Aussi, la plupart des objectifs de la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015 ne semblent pas atteignables pour le bâtiment résidentiel avec les tendances actuelles.
 

Les principales propositions s'articulent autour des axes suivants :

 

- Faciliter l’accès des ménages au crédit pour la rénovation énergétique

- Conditionner les aides publiques à l’efficacité réelle de la rénovation effectuée

- Renforcer le budget du programme Habiter Mieux de l’Anah

- Améliorer et fiabiliser le diagnostic de performance énergétique

- Créer dans chaque région une plateforme permettant d’accomplir clef en main
 les démarches de rénovation en lieu et place des particuliers

- Permettre aux syndics de copropriété de percevoir directement le CITE et rendre obligatoire l’individualisation des frais de chauffage

- Interdire la mise en location de passoires énergétiques à partir de 2025

 

Seule la troisième proposition a un coût pour les finances publiques, que nous estimons à un maximum d’environ 750 millions d’euros par an. Néanmoins, il s’agit d’un effort à destination des publics modestes, qui permet des gains énergétiques réels et immédiats et nous semble adapté au contexte actuel de crise sociale.
 

De plus, la deuxième proposition permettrait de cibler beaucoup mieux les dépenses, et donc de compenser l’effort accru en faveur des plus modestes. Au final, nous ne dépenserions probablement pas moins, mais mieux.
 

La dernière proposition aurait un impact politico-médiatique potentiellement élevé, qui nous semble opportun pour mettre à l’agenda politique l’efficacité énergétique des logements anciens.
 

De plus, aucune proposition ne nécessite le déploiement d’un arsenal législatif complexe.
 

Pour les auteurs de cette étude: "Aller plus loin en matière de rénovation énergétique du bâtiment ne sera possible que si la lutte contre le réchauffement climatique est effectivement érigée en priorité nationale".

 

(1) Pour en savoir plus sur les réflexions et les propositions des auteurs: http://www.annales.org/gazette/2019/gazette_104_11_19.pdf

 

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