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30 / 01 / 2012
Trouillet Michel / Membre
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Ces syndicats hostiles au syndicalisme

L’affaire SeaFrance est plus qu’une triste histoire, c’est un gâchis. Après le refus des élus du comité d’entreprise de signer le plan social proposé par la SNCF, plus de 500 lettres de licenciement ont été envoyées. Selon certains, presque 2 000 emplois indirects sont menacés. Au-delà de la question du bien-fondé de cette solution, c’est le syndicalisme qui est le grand perdant de l’histoire. Le syndicalisme, dont les lettres de noblesse ont été encore une fois écornées par des rumeurs concernant une minorité. À tel point qu’une proposition de loi sur la transparence des comités d’entreprises va être étudiée par l’Assemblée nationale. Si ce dossier va se clore par la radiation du syndicat maritime Nord de la CFDT, il ne s’agit pourtant pas d’un épiphénomène ; à de trop nombreuses reprises, les supposés agissements d’un petit nombre ont participé à la ruine des efforts collectifs.

Il est indéniable que les syndicats ne sont pas les seuls responsables de cet échec général, aux côtés de l’État et des dirigeants de l’entreprise. Il est scandaleux que les employés aient eu à prendre des décisions alors que les conditions exactes, les tenants et les aboutissants étaient confuses. Par ailleurs, les dissonances entre la SNCF et le ministre des Transports ont nui à la tenue d’une négociation sereine et cela participe au sentiment d’écœurement général pour tous ceux qui se sont sentis délaissés. Il est triste que le parfum de Gandrange flotte au-dessus du port.

Malheureusement, ces sordides et fantomatiques histoires ont surtout mis en exergue le côté sulfureux de certaines organisations qui auraient certainement préféré rester dans l’ombre. Cette minorité syndicale qui jette le discrédit sur le nom de syndicalisme ne peut que faire honte aux véritables partenaires sociaux qui se battent pour les droits des salariés.

Pourquoi cela n’éclate-t-il au grand jour que lorsque des emplois meurent ? 

Comment, en effet, ne pas s’indigner à la lecture de tous ces récits de dérives, qui auraient provoqué jusqu’à 3 millions d’euros de perte pour une seule année ? Pourquoi faut-il attendre cet échec catastrophique pour que les langues se délient, pour que les pressions et les menaces soient révélées au grand jour ?

Car il faut également s’interroger sur ce rapport de la Cour des Comptes de 2009, qui pointe du doigt le monopole d’embauche et le système de disparition de marchandises à bord des navires. Son degré de véracité est la question la moins importante. Pourquoi cela n’éclate-t-il au grand jour que lorsque des emplois meurent ? Pourquoi est-il dit que les responsables CFDT du CE refusent de communiquer les comptes de l’année 2009 malgré les décisions de justice ? Les autres syndicats font état du climat de peur qui s’était installé, accompagné de son cortège de menaces physiques. Pourtant, la justice se sera toujours montrée clémente dans les condamnations de ceux qui se seront rendus coupables de violences. Il semble que beaucoup de plaintes auront été classées sans suite.

Mais au-delà de ces actions inqualifiables, ce qui est pointé du doigt par les véritables instances syndicales, c’est le refus aveugle et borné de la part de cette minorité d’envisager, ou même de discuter de toutes les solutions qui auraient pu permettre de préserver l’emploi. Au vu de ces sombres éléments, les différents témoignages des SCOP sont très dubitatifs quant à la réussite, dans le cas de SeaFrance, d’un tel mode de gestion d’entreprise. Nul doute que les 40 000 travailleurs au sein des 2 000 SCOP en France sont d’une autre trempe que ces gens là.

De même que les dockers des ports ne sont pas les seuls responsables de leurs agonies, ces « syndicalistes » ne sont hélas pas la seule cause du déclin et de la chute de SeaFrance. Il reste que ces rumeurs participent néanmoins au dénigrement général du monde du syndicalisme et affaiblissent ainsi encore un peu plus les dernières forces des salariés. Nul doute que le plan de sauvegarde de l’emploi aurait été négocié avec infiniment plus de force et de confiance sans ces sordides allégations, sans ces rumeurs aux allures de poignards. Ironie de l’affaire, le navire qui renforce le service de la compagnie britannique P&O sur la ligne Calais-Douvres s’appelle « Spirit of France ». C’est pour cela qu’il faut lutter contre les amalgames et contre l’anti-syndicalisme : celui-ci se définit par les actes, non par la dénomination.

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