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11 / 01 / 2012 | 2 vues
Claire Vidal / Membre
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Les retraités agricoles plus touchés par les affections de longue durée

Le groupe Agrica présente la troisième vague de résultats de l’étude AMI, unique programme de recherche multidisciplinaire sur le vieillissement et la dépendance en milieu rural et agricole 

Plus fragiles et plus touchés par les affections de longue durée, les retraités agricoles sont pourtant très peu à vivre en institution. 

Lancée en 2007 auprès de 1 000 retraités agricoles, l’étude épidémiologique AMI (initiée par Agrica en association avec la MSA et l’IFR de santé publique), est un programme unique de recherche multidisciplinaire mené sur le vieillissement et la dépendance en milieu rural et agricole. Elle est conduite par le Professeur Dartigues, neurologue et spécialiste en santé publique à l’Université Bordeaux Segalen, Centre de Recherche Inserm U897. L’étude met l’accent sur le vieillissement cérébral (maladie d’Alzheimer), fonctionnel (fragilité et dépendance) et l’identification des spécificités et inégalités de santé entre le milieu rural et le milieu urbain.  

 

Plus d’un retraité agricole sur deux touché par une affection de longue durée (ALD)

Plus de la moitié des retraités agricoles sont atteints d’une affection de longue durée et 36,5 % des participants souffrent notamment d’affections cardiovasculaires telles que l'hypertension artérielle sévère, accidents vasculaires cérébraux, artériopathie chronique, insuffisance cardiaque ou maladie coronarienne. Ces résultats corroborent l’étude pharmaco-épidémiologique menée en parallèle : 80 % des participants à l’étude AMI ont eu recours aux médicaments cardiovasculaires entre 2007 et 2008. Les deux autres affections de longue durée les plus fréquentes sont les cancers (11,1 %) et le diabète (10,1 %).Une analyse spécifique comparant ces résultats aux données du régime général confirme que ces retraités agricoles sont plus fréquemment déclarés en ALD et sont davantage touchés par les affections cardiovasculaires, notamment l’insuffisance cardiaque (2 fois plus touchés). Ces analyses soulignent également qu’ils seraient moins fréquemment déclarés en ALD cancer, comme observé dans l’étude AGRICAN où les agriculteurs présentent une moindre mortalité par cancer. Cependant, à ce stade, des analyses complémentaires sont nécessaires pour expliquer les résultats observés sur AMI.  

Les retraités du monde agricole plus fragiles que les citadins…

Un travail exploratoire a été réalisé sur la fragilité à l’aide d’un indicateur basé sur cinq composantes : la perte récente de poids, l’épuisement, la sédentarité, la lenteur de la marche et la faiblesse musculaire. Ce travail est le premier du genre réalisé spécifiquement sur une population rurale âgée issue du monde agricole en France. Il montre que près de 9 % des participants peuvent être considérés comme fragiles, contre 7 % dans l’étude française des 3Cités, menée sur une population exclusivement urbaine. L’écart de 2 % peut s’expliquer en partie par l’âge moyen plus élevé des participants de l’étude AMI. D’autres facteurs associés à la fragilité ont également été détectés : l’hypertension artérielle, les difficultés respiratoires, la dépression, la démence ou encore l’isolement social et le niveau de satisfaction de la vie.  

Mais moins nombreux à vivre en institution et à être suivis médicalement

  • Seuls 3,5 % des retraités agricoles suivis dans l’étude AMI vivent en institution (EHPAD).

Ce faible taux se vérifie particulièrement pour les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer et troubles apparentés : parmi elles 15,7 % vivent en institution contre 40 % des malades dans la cohorte Paquid (population globale des 75 ans et plus). Par ailleurs, 52 % des participants d’AMI touchés par ces pathologies n’ont eu aucun recours à un médecin, contre 32 % en milieu urbain (étude des 3Cités). Et 80 % d’entre eux ne sont pas non plus répertoriés officiellement comme atteints par une affection longue durée dans les bases de données de l’assurance maladie (MSA). En milieu rural, la prise en charge de la perte d’autonomie s’organise davantage autour du domicile ou dans le cadre d’autres formes d’hébergement : famille d’accueil, foyer logement… Le milieu agricole avec ses traditions de solidarité familiale et de voisinage notamment s’adapte beaucoup mieux, semble-t-il, au vieillissement, à la dépendance et aux autres troubles liés à la maladie d’Alzheimer et syndromes apparentés. Le maintien à domicile semble par ailleurs préserver les retraités agricoles de la malnutrition. En effet, la prévalence de la malnutrition est faible à 1,4 %, comparativement à l’étude réalisée dans des établissements d’hébergement pour personnes âgées en Aquitaine en 2005, où elle était estimée à 19 %.

Le niveau d’études, un facteur discriminant face à la maladie

L’étude AMI confirme également qu’un retraité agricole a deux fois plus de risques d’être atteint de troubles neuro-dégénératifs de type Alzheimer s’il n’a pas obtenu son certificat d’études primaires (16,6 % contre 8,3 %) et trois fois plus de présenter de multiples pathologies ou déficiences (48 % contre 15 %).

Un faible niveau d’études peut en effet être un indicateur indirect des conditions de vie et de travail, de la sensibilité aux messages de prévention, des difficultés financières d’accès aux soins notamment spécialisés (lunetteries, soins dentaires, prothèses auditives…). Les personnes ayant un moindre niveau d’études ont également deux fois plus de risques de souffrir d’une affection longue durée, notamment l’hypertension artérielle, l’insuffisance cardiaque, le cancer et le diabète.  

Pour le groupe Agrica, l’étude AMI se révèle être une formidable fenêtre ouverte sur la population agricole dont elle est le partenaire naturel. L’analyse et l’utilisation des résultats recueillis ouvrent des perspectives prometteuses pour une meilleure prise en considération des particularités du monde agricole et un accompagnement toujours plus adapté. La participation du groupe à cette étude s’inscrit totalement dans sa démarche socialement responsable. Soulignons que les données de l’étude AMI ont été intégrées aux travaux réalisés par l’équipe du Professeur Dartigues sur la modélisation de la dépendance pour la CNSA (caisse nationale de solidarité pour l’autonomie) dans le cadre de la réflexion sur la prise en charge de la dépendance.

Plus d'information sur le programme AMI > Conduite par l’équipe de recherche du Professeur Dartigues de l’Université de Bordeaux Segalen, l’étude se base sur l’analyse des conditions de vie d’un échantillon de 1 000 retraités de la région de Gironde. Première initiative consacrée à la population rurale retraitée, AMI propose une analyse originale, multidisciplinaire et globale de l’état de santé et du vieillissement en milieu rural avec : épidémiologie de pathologies liées à l’âge (démences, Alzheimer, maladie de Parkinson, dépression, diabète, cancers…), vieillissement fonctionnel, nutrition, pharmaco-épidémiologie, psychologie, aspects démo-géographiques, ophtalmologie, neuroimagerie, vie sociale et relations à l’environnement, et s’inscrit sur une durée de 5 ans. Les résultats de l’étude sont mis en perspective avec l’étude des 3Cités qui porte sur un échantillon en milieu urbain. Le programme de recherche AMI, initié par le groupe AGRICA en association avec la MSA, et mené par l’IFR de santé publique, examine les maladies liées à l’âge en termes de prévalence, d’incidence et de facteurs de risque. Elle doit permettre d’identifier les spécificités du monde agricole et rural et d’apporter des réponses aux inégalités éventuellement constatées. L’étude se base sur des visites réalisées à domicile par des neuropsychologiques, infirmières et éventuellement des médecins, des auto-questionnaires, des prélèvements sanguins avec analyses biologiques et génétiques et des IRM. AMI contribue également au développement de la recherche sur les maladies neuro-dégénératives et la dépendance, en cohérence avec le plan Alzheimer encouragé par les pouvoirs publics. À ce titre, la Direction Générale de la Santé s’est associée au projet AMI et a financé un programme de recherche complémentaire sur l’altération tissulaire dans les stades précoces de la maladie d’Alzheimer (AMImage) lancé fin 2008. Dans le cadre de ce projet, plus de 320 IRM ont été réalisées sur un sous-échantillon de la cohorte AMI, au CHU de Bordeaux. Description de l’échantillon : les 1 002 participants de l’étude sont âgés en moyenne de 76 ans et habitent l’une des 270 communes rurales du département de la Gironde. Environ 30 % d’entre eux sont exploitants agricoles et 70 % salariés, tandis que 37,5% sont des femmes, 24 % sont veufs ou veuves et un quart vivent seuls.

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