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15 / 02 / 2010 | 119 vues
Denis Jacob / Membre
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Coup de gueule : les policiers en ont marre d'être stigmatisés

Depuis plusieurs jours, les policiers sont montrés du doigt, stigmatisés ! Alors je passerai peut-être pour quelqu'un de partial puisque je suis policier, syndicaliste, mais il est nécessaire d'exposer clairement notre argumentation sur les questions de GAV, de menottage et de culture du résultat car personne d'autre ne le fera à notre place, face à la polémique médiatico-politique lancée il y a plusieurs semaines.

Nous en avons plus qu'assez d'être montrés comme les méchants policiers face aux gentils gardés à vue et leurs avocats.

Il est évident que la population en général méconnaît le droit français (et c'est bien compréhensible, compte tenu de sa complexité). Sur la garde à vue, il suffit de consulter le code de procédure pénale pour en connaître le fonctionnement. La GAV n'est pas une possibilité laissée au policier mais une obligation quand il y a une victime avec dépôt de plainte (qui plus est quand il y a des témoins) et/ou des éléments qui permettent de dire qu'une personne a commis ou tenté de commettre un délit ou un crime punis d'une peine d'emprisonnement.

  • Sur la culture du résultat, oui, Aliance est favorable à la culture du résultat car c'est l'essence-même de l'existence de la police nationale. Une police sans résultat, c'est l'anarchie dans un pays. Demain si lors d'un vol ou d'une agression (donc, dépôt de plainte), le plaignant sera bien content que la police nationale retrouve l'objet du vol ou l'agresseur, et que cet agresseur soit placé en garde à vue afin notamment de faire l'objet d'une confrontation pour dire s'il s'agit bien du voleur ou de l'agresseur.


En revanche, nous sommes opposés à la politique du rendement qui consiste à passer son temps à faire des PV au stationnement. La vision de notre métier est avant tout basée sur la lutte contre la délinquance et la criminalité.

Sur l'augmentation des GAV, le rapport de l'Observatoire National de la Délinquance fait état d'un doublement des violences et des atteintes aux personnes physiques, entre 1996 et 2009, de 220 000. Nous en sommes aujourd'hui à plus de 450 000. Plus il y a de telles infractions, plus il y a de plaintes, il y a donc plus de mises en cause et par conséquent, plus de gardes à vue.

Quand on voit que les avocats ne sont pas capables aujourd'hui d'être présents dès la première heure pour une simple prise de contact avec la personne placée en GAV...

Sur les droits des personnes en GAV, il y a quelques années, les avocats ont demandé leur présence dès la première heure pour assurer les droits des appréhendés. Ainsi, cette réforme a permis la présence dès la première heure de l'avocat, la possibilité pour la personne de passer un appel téléphonique, de voir un médecin. Parallèlement à cela, la police nationale octroie un repas sur les deniers du contribuable (est-il nécessaire de le dire ?).

Il est vrai que certains locaux sont inhumains, sales et nauséabonds, les policiers travaillent dans de tels locaux à longueur de journée et sont les premiers à s'en plaindre. Notre syndicat se bat pour améliorer cette situation et obtenir les rénovations nécessaires. D'ailleurs, la LOPPSI 2 (voir dans la presse de ces derniers jours) prévoit une modernisation et une humanisation de ces locaux. Par exemple, le commissariat du XXème arrondissement de Paris est considéré par la presse comme le « Bristol » des gardes à vue (local individuel vitré, couverture et matelas, repas chaud, sonnette individuelle pour appeler les policiers, caméra de surveillance, toilette individuelle préservant l'intimité). Il y a encore beaucoup à faire mais on ne peut pas dire aujourd'hui que rien n'est fait pour améliorer la situation indépendante bien évidemment de la volonté des policiers !

Intérêt mercantile pour les avocats ?

Les avocats, qui se plaignent de la garde à vue aujourd'hui, sont les mêmes qui ont permis la mise en place du système actuel. Et quand on voit que les avocats ne sont pas capables aujourd'hui d'être présents dès la première heure pour une simple prise de contact avec la personne placée en GAV (exemple : l'affaire du XXème arrondissement de Paris du 5 février 2010, l'avocat prévenu immédiatement ne s'est présenté que 4h30 plus tard), quel intérêt alors d'avoir un avocat dès la première heure pour consulter le dossier tout en précisant qu'un tel accès permettrait de fausser la procédure puisque le travail de l'avocat est de prouver l'innocence de son client coûte que coûte, on peut facilement imaginer les dérives d'une telle mise en œuvre...

Le véritable intérêt pour les avocats est peut-être purement mercantile, et je vous invite à lire l'article du Figaro du 10 février 2010 qui dévoile un rapport du Ministère de la Justice. Demain, pour payer les avocats commis d'office pour les personnes en GAV, il faudrait près de 800 millions d'euros (selon les dires même du Conseil national des Barreaux).

  • Ce budget serait, une fois de plus, pris sur le dos des contribuables par l'application d'une taxe notamment sur les contrats d'assurance (habitation, voiture, moto) sur la partie « protection juridique ».


Et les victimes dans tout ca ? Qu’est-ce qu'on en fait ? Ont-elles droit à un avocat dès la première heure aux frais du contribuable ?  Non !

D'ailleurs sur cette démarche ambigüe (éventuellement mercantile) je vous invite à consulter le blog de M. Charrière Bournazel, ardent défenseur de la réforme de GAV, et de prendre connaissance de son discours du 8 octobre 2009 au Brésil sur la situation économique et financière des avocats en France...

Sur la Cour européenne, là aussi, un complément d'information est nécessaire. Sur la garde à  vue, la Cour n'a pas condamné la France, et la Cour d'Appel de Paris a rejeté le 9 février 2010 une demande d'annulation de la procédure pour garde à vue abusive dans le cadre d'un trafic de stupéfiants importants. La Cour européenne se base sur des arrêts rendus pour la Turquie. Or, la procédure dans ce pays est fort heureusement différente de celle de la France. Mais si la Cour d'Appel de Paris ne s'était pas prononcée défavorablement sur cette demande, des dealers auraient été relâchés. Si vous avez des enfants, souhaitez-leur de n'être jamais confrontés et exposés à ce genre d'individus.

  • Enfin, sur le menottage, régi par l'article 803 de code de procédure pénale, il n'y a effectivement pas d'obligation de menotter systématiquement. Le fonctionnaire de police peut décider ou non de le faire. Cependant, cela engage sa responsabilité.


Imaginez un enfant de 13 ans interpellé (quelle que soit la nature de l’infraction), que la police ne connaît pas. On ne sait pas quelle réaction cet enfant peut avoir face à la police. La peur conduit souvent à des réactions inattendues et/ou violentes. Par peur, un enfant non menotté, dans un véhicule de police, peut ouvrir la portière, sauter sur la chaussée et se faire renverser et tuer. Que vont dire les parents ? Que va penser la population ? Il s'agira d'une bavure. Alors deux précautions valent mieux qu'une.

  • Oui, le menottage peut choquer. Oui, la mesure peut paraître incompréhensible et disproportionnée par rapport à l'infraction. Mais le menottage ne tue pas. Ne pas l'appliquer peut avoir des conséquences dramatiques d'une part, et engagera la responsabilité pénale du policier d'autre part.


Compte tenu de la stigmatisation des policiers aujourd’hui, en matière de garde à vue et de menottage mais aussi relativement aux tasers, aux armes à feu, aux tonfas (bâtons de défense), aux GTPI (techniques d’intervention apprises en école, permettant de maîtriser des récalcitrants), vous comprendrez que les policiers prennent toutes les précautions pour éviter toute mise en cause !

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