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21 / 11 / 2012 | 2 vues
Xavier Berjot / Membre
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Le licenciement pour faute

Le Code du travail ne définit pas la notion de faute ou de comportement fautif et la jurisprudence a donc progressivement forgé les contours de cette notion.

La notion de comportement fautif

Le comportement fautif est celui qui résulte d'un fait établi et imputable au salarié, constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail.

La faute commise par le salarié correspond à l’une de ces trois qualifications, en fonction de sa gravité : faute simple, faute grave, faute lourde.

  • La faute simple

La faute simple peut être définie comme celle qui est suffisamment sérieuse pour justifier le licenciement du salarié.

À titre d’illustration, constitue une faute simple le fait, pour un salarié cadre, d’effectuer un travail personnel pour le compte d'un ami pendant l'horaire normal de travail, en période d'extrême surcharge et au détriment des dossiers internes (Cass. soc., 4 juin 1997, n° 94-43568).

De même, commet une faute simple le chauffeur routier qui se fait accompagner dans son travail par son épouse, au mépris de la réglementation professionnelle (CA Rouen, 8 février 2000, n° 97-1301).

En cas de licenciement pour faute simple, le salarié doit percevoir son indemnité de licenciement et doit bénéficier de son préavis de licenciement.
 
  • La faute grave

La faute grave est, selon la formule de la Cour de Cassation, « celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise » (Cass. Soc., 27 septembre 2007, n° 06-43867).

Cette faute résulte donc d’un fait (ou d’un ensemble de faits) imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle, qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise.

Par exemple, peut constituer une faute grave le non-respect réitéré des consignes de l’employeur en matière d'horaires de travail (Cass. Soc., 15 novembre 2005, n° 03-45005).

De même, la tenue de propos injurieux et menaçants à l’égard d’un client de l'entreprise caractérise une faute grave (Cass. Soc., 13 juillet 2010, n° 09-42127).

La faute grave est privative du préavis de licenciement (article L. 1234-5 du Code du travail).

Par ailleurs, elle ne donne pas droit à l’indemnité de licenciement (article L. 1234-1 du Code du travail).

  • Bien que cette situation ne soit pas fréquente, certaines conventions collectives prévoient que le licenciement pour faute grave n’est pas privatif d’indemnité de licenciement et/ou de préavis

En ce cas, ces dispositions conventionnelles doivent naturellement être respectées par l’employeur.
 
  • La faute lourde

La faute lourde est celle qui est commise par le salarié avec l'intention de nuire à l'employeur.

Cette faute ne se caractérise donc pas, tant par sa gravité, que par son caractère intentionnel.

Pour que le bien-fondé du licenciement pour faute lourde soit reconnu par le Conseil des Prud’hommes, l’employeur doit faire ressortir, dans la lettre de licenciement, que le salarié a commis la faute qui lui est reprochée dans l’intention de nuire à l’entreprise.

Ainsi, le détournement d’argent, par un chef comptable, ne constitue pas une faute lourde, mais une volonté de s’enrichir (Cass. soc., 18 novembre 2003, n° 01-44102).

En revanche, constitue une faute lourde le fait, pour un responsable d’exploitation, de commander la livraison d'une importante quantité de fuel, aux fins de se livrer volontairement à une malversation relevant d'une intention délibérée de nuire aux intérêts de l’entreprise (Cass. soc., 15 novembre 2011, n° 10-22789).

La faute lourde est privative d’indemnité de licenciement et de préavis, mais aussi de l’indemnité compensatrice de congés payés (article L. 3141-26 du Code du travail).

Les particularités liées aux licenciements pour faute


Tous les licenciements pour faute obéissent à des règles particulières, liées à la prescription des faits fautifs et à la possibilité de procéder à une mise à pied conservatoire du salarié.

  • Les règles de prescription des faits fautifs

Il résulte de l’article L. 1332-4 du Code du travail qu’« aucun fait fautif ne peut donner lieu, à lui seul, à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ».

Pour la Cour de Cassation, la connaissance des faits, par l’employeur, doit être comprise comme l’information exacte sur la réalité, la nature et l’ampleur des faits reprochés au salarié (Cass. soc., 17 février 1993, n° 88-45539).

Selon la Cour de Cassation, le délai de deux mois n’est pas ni suspendu, ni interrompu par la maladie du salarié.

Par conséquent, l’employeur doit convoquer le salarié à l’entretien préalable à son éventuel licenciement dans ce délai.

À défaut, le licenciement peut être jugé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Précisons également que les dispositions de l’article L. 1332-4 susvisé n’interdisent pas à l’employeur de prendre en considération un fait datant de plus de deux mois, si le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai  (Cass. soc., 20 octobre 2009, n° 08-41036).

Par ailleurs, aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l’engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l’appui d’une nouvelle sanction (article L. 1332-5 du Code du travail).

Ici encore, ce délai de trois ans court à compter de la date de la convocation du salarié à l’entretien préalable.

Enfin, il est important de relever que le licenciement pour faute ne peut intervenir plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien préalable (article L. 1332-2 du Code du travail).

  • La mise à pied à titre conservatoire
La mise à pied à titre conservatoire s’applique au licenciement pour faute grave ou lourde.

Prévue par l’article L. 1232-3 du Code du travail, elle peut être définie comme l’acte par lequel l’employeur demande au salarié de ne plus se rendre à son poste de travail, dans l’attente de la décision à intervenir.

L’employeur qui reproche une faute grave ou lourde au salarié n’a pas l’obligation de lui notifier une mise à pied à titre conservatoire.

Toutefois, cette mesure s’impose en pratique, puisque ces fautes impliquent, par définition, que le maintien du salarié dans l’entreprise n’est plus possible.

La mise à pied à titre conservatoire a pour effet de suspendre immédiatement l’exécution du contrat de travail.

Elle est généralement notifiée au salarié en même temps que sa convocation à l’entretien préalable au licenciement.

Pendant la période de mise à pied à titre conservatoire, le salarié ne perçoit aucune rémunération.

En revanche, si l’employeur estime finalement que les faits ne justifient qu’un licenciement pour faute simple, le salarié peut prétendre à la rémunération correspondant à la période de mise à pied à titre conservatoire (Cass. soc., 3 février 2004, n° 01-45989).

Attention : la lettre de licenciement pour faute grave ou lourde doit toujours rappeler, au salarié, que sa mise à pied à titre conservatoire est confirmée et que la rémunération correspondante ne lui sera pas versée.
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