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14 / 03 / 2012 | 10 vues
André Dormoy / Membre
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« La participation des salariés aux décisions de gestion est désormais une exigence qui passera par le renforcement des moyens et prérogatives des CE » - Christophe Baumgartem, avocats

Le CE est l’instance qui dispose actuellement le plus de moyens d'information, d'analyse et de communication avec les salariés. Pourtant, dans les entreprises, ces moyens déjà insuffisants sont quotidiennement rognés alors que la voix des salariés devrait pouvoir se faire entendre non seulement dans (mais également au-delà de) l'entreprise.

C’est l’analyse de Christophe Baumgartem, fondateur du cabinet JDS Avocats, qui animera le débat sur les évolutions du CE qui se tiendra le mercredi 21 mars au salon Elucéo avec Alain Vidalies, Député des Landes et secrétaire national du PS au Travail et à l’Emploi, Jean-Marie Vanlerenberghe, Sénateur du Pas-de-Calais (MoDem) et André Chassaigne, Député du Puy-de-Dôme (Front de Gauche-PCF).

Interview de l’animateur en forme de mise en bouche


Pourquoi y a-t-il selon-vous un appauvrissement des informations communiquées par les directions aux représentants du personnel ?

Selon les entreprises, les raisons peuvent être différentes. Il s'agit parfois d'une volonté délibérée d'employeurs qui considèrent que l'entreprise c'est leur affaire et pas celle des salariés et de leurs représentants. Mais souvent, cela tient au fait que les directions ne sont plus des directions mais de simples courroies de transmission des actionnaires. Quelle information peut-on bien donner lorsque l'on n'a plus de projet industriel à mettre en œuvre, mais seulement à réaliser des objectifs financiers à court terme fixés par d'autres ? Le phénomène est encore plus marqué dans les groupes internationaux dans lesquels certaines « directions » françaises apprennent par les journaux les décisions transnationales dont ils devront mettre en œuvre les conséquences en France.

Quand les directions transmettent des  informations , celles-ci sont souvent marquées en totalité du sceau de la confidentialité. Comment lutter contre ces abus ?

L'obligation de discrétion ne s'impose que lorsque l'information donnée au CE est confidentielle par nature et présentée comme telle. Les directions d'entreprise ont pris pour habitude d'incrire la mention « confidentiel » sur chaque page des documents remis alors que peu d'informations fournies sont confidentielles par nature. Les élus devraient systématiquement voter des motions demandant à l'employeur de préciser les informations qui sont, selon lui, confidentielles par nature et en cas de refus faire valoir que la consultation est irrégulière.

En effet, il est dans l'essence même de la mission des représentants du personnel de pouvoir échanger avec les salariés sur les projets présentés. Empêché de communiquer avec les salariés et donc de recueillir leur avis et leurs propositions, le CE ne dispose pas de tous les éléments lui permettant de rendre un avis motivé. Lorsque les CE votent une telle motion, les employeurs, pour la plupart, ne prennent pas le risque de laisser le juge arbitrer le litige et ils lèvent la confidentialité.

Partons du principe qu’une direction diffuse des informations d’un bon niveau sans chercher à circonscrire la diffusion au CE : les représentants du personnel ont-ils les moyens de restituer les informations aux salariés ?

Ils se heurtent à plusieurs difficultés : avec seulement 20 heures de délégation hors temps de réunion, les élus n’ont pas le temps de retraîter l’information, de la restituer et d'animer le débat au sein de la collectivité de travail. Par ailleurs, du fait des horaires décalés et de la dispersion des lieux de travail, il devient diffficile d'organiser des réunions d'information et il n'existe plus d'« heures d'entrée et de sortie du personnel » au cours desquelles une information sous forme de tracts pourrait être diffusée. Enfin, et surtout, à défaut d'accord de l'employeur, les représentants du personnel sont privés du droit de s'adresser aux salariés avec les moyens modernes de communication.


Vous considérez que le rôle du CE devrait aller au-delà de la simple chambre d’enregistrement pour véritablement participer à la gestion de l’entreprise. À quelles conditions ?

L'idée que l'actionnaire n'est pas, au nom du droit de propriété, l'alpha et l'oméga de l'entreprise fait de plus en plus son chemin. Le droit au travail et le droit de vivre décemment de son travail sont également des droits fondamentaux. À l'extérieur de l'entreprise, d'autres intérêts ne peuvent être ignorés : ceux de l'État et des collectivités terrritoriales qui financent les infrastructures nécessaires à l'activité économique et à la formation, ceux des organismes d'assurance chômage, d'assurance maladie, sans parler de ceux des fournisseurs et des consommateurs. Il n'est plus acceptable que des décisions qui affectent fortement la vie des individus et de la collectivité soient pris par quelques uns au seul nom du profit à court terme. Les CE doivent tenir un rôle central dans le processus de décision, quitte dans certains cas à disposer d'un droit de véto.



N’y a-t-il pas un brouillage entre les prérogatives des instances représentatives du personnel et celles des syndicats ?


Ce serait un tort que de penser qu'en affaiblissant le rôle des CE, le droit syndical va s'en trouver renforcé. Au contraire, l'action revendicative et l'effectivité de la négociation collective se nourrissent des informations reçues et analysées par les instance représentatives élues. Le développement de la démocratie et de la citoyenneté dans l'entreprise par le renforcement des IRP est plus que jamais nécessaire.

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