Participatif
ACCÈS PUBLIC
21 / 03 / 2016 | 3 vues
Didier Cozin / Membre
Articles : 167
Inscrit(e) le 23 / 07 / 2012

L'abandon des cotisations du plan de formation : le troisième échec de la réforme de la formation

La disparition en 2015 de la cotisation de 0,9 % des entreprises ne pouvait que provoquer la brutale chute de l’effort de formation que chacun déplore désormais en France.

Dans un pays qui n’aimait guère la formation (et qui néglige souvent son éducation), la disparition de la cotisation de formation a été une mesure démagogique et irresponsable.

Dans un pays qui formait peu, il ne fallait surtout pas jouer aux apprentis sorciers.

La France n’a jamais été un pays capable de promouvoir sa formation et, si depuis 1971, le législateur avait mis en place une cotisation obligatoire (le 1 % de formation qui aurait dû évoluer vers 2 % quelques années plus tard), la vieille revendication patronale pour un abandon de cette cotisation n’aurait jamais dû être exaucée par les pouvoirs publics à l’occasion de la réforme.

Six ans après la crise de 2008 (qui a vu l’effort de formation de presque toutes les entreprises régresser), alors que 10 % à peine des entreprises avaient une véritable politique de développement des compétences, était-il pertinent de faire disparaître cette cotisation du plan de formation sous prétexte d'une (prétendue) baisse des charges ?

Une enquête (DIFES1) menée par la DARES et le CEREQ en 2008 démontrait que seules 10 % des entreprises avaient en France une véritable politique de développement des compétences, que 50 % d’entre elles n’en avaient même aucune (les autres formant peu, formant mal ou ne formant qu’une petite minorité de salariés très qualifiés). 

Cette étude officielle illustrait en 2008 les mauvaises pratiques éducative du monde du travail face à la formation avec :

  • de faibles occasions de développement des compétences (et donc du capital humain) dans un pays qui n’accorde depuis Jules Ferry qu’une seule chance à ses habitants, durant leur éducation initiale ;
  • l’impossibilité d’anticiper individuellement et collectivement les changements professionnels (comme si le code du travail empêchait de regarder la réalité sociale et financière en face) ;
  • le faible nombre de reconversions professionnelles volontaires émanant aussi bien des entreprises (pour qui la GPEC est souvent un simple exercice de style) que des salariés (qui s’estiment protégés par leur CDI) ;
  • des budgets de formation très réduits (6 milliards sont disponibles par an, selon le rapport d’application de la loi, et non 32 milliards comme cela a complaisamment été indiqué  partout dans les médias) ;
  • une formation très rarement orientée vers les salariés non qualifiés (considérés comme une simple main d’œuvre) et pour qui les bonnes résolutions prises lors des ANI sont oubliées dès l’encre des accords sociaux sèche.

Faire disparaître la cotisation obligatoire de 0,9 %, c'était à la fois :

  • s'appuyer sur une introuvable responsabilisation professionnelle du monde du travail,
  • et ne pas prendre la mesure de la faiblesse des budgets réels en formation (faiblesse censée être compensée par un CPF qui ne sera jamais généralisable, comme nous le verrons dans un prochain article).

Les résultats de la « réforme » que chacun constate depuis un an ne feront qu'aggraver la situation sociale, éducative et économique de notre pays :

  • des services de formation souvent réduits à leur plus simple expression, voire externalisés ;
  • une formation vécue comme une simple taxe (pour les œuvres sociales ou syndicales : FPSPP ou OPCA) ;
  • une complexité accrue par une loi bavarde et inapplicable (faite de compromis politiques et syndicaux impraticables sur le terrain) ;
  • une compétitivité en déclin du fait des compétences insuffisantes de nombreux salariés.

L’abandon du plan de formation et de son financement est un choc pour notre économie et, comme nous le verrons dans un quatrième volet, la substitution du plan de formation par le compte personnel de formation ne pourra améliorer la situation des salariés à court ou moyen terme.

Pas encore de commentaires