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16 / 01 / 2019 | 83 vues
Hélène Fauvel / Abonné
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Des finances publiques éparpillées façon puzzle ou la « géographie revisitée »

Le 9 janvier, le directeur général a convié les secrétaires généraux des quatre organisations syndicales représentatives de la DGFiP, siégeant au comité technique de réseau (CTR), à une réunion dans son bureau afin de leur exposer les premiers éléments de ce qu’il nomme « géographie revisitée ».

Cette notion, développée par Gérald Darmanin sous le vocable « déconcentration de proximité » le 11 juillet 2018 avait fait l’objet le lendemain, au CTR du 12 juillet, d’une sorte de service après vente (compte rendu).

Des espoirs de reconquête déçus

Il s’agit en gros de répartir autrement les effectifs et de revenir, sous une forme nouvelle, dans des territoires où nous ne sommes plus, voire dans ceux où nous n’avons jamais été présents. Pour ceux qui auraient cru à une reconquête de territoires abandonnés par la DGFiP, ils seront déçus.

Dans sa présentation, le projet peut paraître séduisant car, « pour tenir compte des aspirations des agents à travailler en dehors des grands centres urbains », le directeur général propose délocaliser des services jusqu’alors implantés dans de grandes métropoles dans des villes moyennes où, selon ses propos, il ferait bon vivre.

Ainsi, au moyen du travail à distance, il serait possible de permettre aux agents volontaires de travailler plus près de leur domicile, dans des lieux où le coût du logement ne leur confisquerait pas une part importante de leur pouvoir d’achat.

Sur les grands principes, il s’agirait aussi d’augmenter les points de contact mais « pas obligatoirement sur la base d’un immeuble avec des agents en permanence à l’intérieur et le drapeau DGFiP sur le toit ».

La DGFIP serait-elle aussi dans « l'itinérance » ?

Autrement dit, ces points de contact se feraient soit par le bais d’une présence physique de la DGFiP dans des maisons de service au public (MSAP), de permanences ponctuelles dans les locaux des collectivités territoriales ou encore d’antennes mobiles. La DGFiP serait-elle aussi dans « l’itinérance » ?

Au cours de la discussion, le directeur général s’est montré globalement assez peu précis (sauf sur le secteur public local), tout en insistant sur le fait que la réflexion démarrait seulement. Pourtant, si nous en croyons un document remis aux directeurs locaux lors de la réunion du 13 décembre, la cible est un peu plus précise.

Que faut-il retenir du document à destination des directeurs locaux ?

Comme trop souvent, nous n’avons pas été destinataires de cet écrit, y compris a posteriori, le directeur général considérant (et nous l’ayant d’ailleurs dit) qu’il ne lui semble pas nécessaire que les représentants du personnel disposent du même niveau d’information que les responsables locaux. C’est dire si la place du dialogue social lui importe et si les discussions s’annoncent constructives !

Nous nous le sommes bien évidemment procuré ce document. Que faut-il en retenir ?

En premier lieu, dans l’esprit du directeur général, la DGFiP est condamnée aux suppressions d’emplois puisque l’organisation du réseau est coûteuse et ancienne, fruit d’usages ne correspondant plus aux besoins. Comme toujours, il s’agirait en quelque sorte, pour écrire l’histoire, de mettre la pagaille dans la géographie.

En second lieu, il faudrait tenir compte des équilibres des territoires qui se sentent déshérités et y proposer des services innovants (présence ponctuelle et sur rendez-vous, contacts vidéo, etc.) en fonction de l’appréciation des besoins, ou encore, sortir des services au sein des chefs-lieux les plus importants, en développant le mode d’organisation « front/back office ».

Des orientations trés précises pour les directeurs locaux

Ce document détaille les orientations esquissées par le directeur général le 12 juillet dernier. En particulier, et c’est là que le bât blesse, un paragraphe indique de manière très précise les hypothèses que les directeurs locaux devront intégrer pour mener leur réflexion. Il est ainsi fait référence au travail à domicile ou aux espaces de co-working.

De même, il faudrait intégrer un mode d’organisation des trésoreries de secteur public local où les tâches « industrialisables » (c’est-à-dire le visa des dépenses et recettes, les paiements et encaissements) seront concentrées sur un nombre réduit de « back offices » pendant qu’un cadre par EPCI se consacrerait à l’expertise et au conseil aux élus.

Il faudrait aussi regrouper les trésoreries hospitalières sur le périmètre des groupements hospitaliers de territoires dans la limite haute de 50 équivalents temps plein (ÉTP).

Quant aux services de impôts des particuliers (SIP) et services des impôts des entreprises (SIE), ils subiraient le même sort en matière de regroupement, dans la même limite du nombre d’ÉTP.

Les services de publicité foncière (SPF) continueraient d’être resserrés des deux tiers sur la base du plan pluriannuel et ne seraient pas nécessairement localisés au chef-lieu du département.

Une concertation locale devrait s’ouvrir en mars auprès des élus locaux puis des représentants locaux du personnel, des cadres et des agents, selon des modalités qui seront précisées ultérieurement. La délocalisation des services situés dans des grandes métropoles releverait d’une concertation au niveau national. Les suppressions d’emplois se poursuivraient sur la base d’un contrat pluriannuel dont, pour le moment, nous ne savons rien, si ce n’est qu’il serait en discussion avec la direction du budget. Parallèlement, l’accueil sur rendez-vous deviendrait la règle.

Pour nous, si certaines des propositions telles que la relocalisation de services, le télétravail ou le travail à distance méritent d’être examinées pour les agents concernés, ce qui se profile est bien un service rendu à géométrie variable, différencié selon les territoires, combinant services de plein exercice et simples points de contact et à caractère plus ou moins permanent.

À l’horizon 2022, il pourrait ne plus exister de trésorerie de secteur public local sous la forme que nous connaissons : « front/back office » en zone rurale ou péri-urbaine et agences comptables dans les grandes villes.

S’agissant des SIP et SIE, combien seront maintenus dans chaque département et où seront-ils localisés ?

Compte tenu du contexte politique et social, le calendrier pourrait cependant ne pas être celui prévu. Le débat public qui se profile intègre aussi ,en sus du pouvoir d’achat et de la fiscalité, la présence de l’État dans les territoires.

Enfin, la prime de 200 € annoncée par le ministre a été évoquée car, ni son montant, ni son périmètre, ne sont satisfaisants, pas plus que la tonalité de la dépêche AFP dans laquelle le ministre fait référence à une « petite surcharge de travail ».

Dans un tel contexte, il nous appartient collectivement de décider de notre avenir, de celui de nos missions et de nos conditions de travail. Un préavis de grève reconductible à compter du 2 janvier a été déposé par le syndicat le 21 décembre dernier. Tous ensemble, il faut dire non. Personne ne défendra nos missions à notre place.

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