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15 / 03 / 2018 | 5 vues
Philippe Pihet / Membre
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Réforme des retraites : comment assurer la transition d'un système à l'autre ?

C’est la question que s’est posée le Conseil d’orientation des retraites lors de sa séance du mois dernier, en étudiant :
  • les trois modes de calcul des droits à la retraite selon les systèmes de retraite ;
  • les différents paramètres et leur prise en compte selon les 3 modes de calcul ;
  • la problématique de la transition d’un système à l’autre et des difficultés qui se posent.

Les trois modes de calcul des droits à la retraite

■ Les régimes de retraite en annuités : c’est le système adopté par les régimes de retraite de base en France. Lors de la liquidation, le montant de la pension est le produit du taux d’annuité du régime, de salaire de référence de l’assuré et de sa durée d’assurance. Décote et surcote peuvent être appliquées. Le montant de la pension ne dépend pas du taux de cotisation.
 
■ Les régimes en points : les cotisations versées sont converties en points de retraite suivant la valeur du point. Le nombre de points est lié au taux de cotisation. Lors de la liquidation de la retraite, le nombre de points est multiplié par la valeur du point. Une décote ou une surcote peuvent aussi intervenir.
 
■ Les régimes en comptes notionnels : le montant de la retraite lors de la liquidation est proportionnel aux droits en euros, c’est-à-dire aux cotisations versées au cours de la carrière. Le coefficient de proportionnalité ou de conversion prend en compte l’âge de départ et l’espérance de vie.

Comparaison des différents modes de calcul des droits à la retraite en répartition

On considère fréquemment les régimes en annuités comme des régimes à « prestations définies », tandis que les régimes en points ou en comptes notionnels sont considérés comme des régimes à « cotisations définies ». Le pilotage des régimes en annuités est
le plus souple. Le gestionnaire peut en effet agir sur plusieurs paramètres, selon le résultat à atteindre.

Le régime en points est moins souple que le précédent. Toutefois, il y a possibilité de faire varier le résultat par la valeur du point.
 
Le système le plus rigide est celui en comptes notionnels car il obéit à la logique actuarielle par génération, entre les cotisations reçues et les pensions versées, par le biais du coefficient de conversion.

Aussi retrouve-t-on quatre paramètres dans tous les régimes : le taux de cotisation, l’âge de départ en retraite, la durée d’activité et le taux de revalorisation mais le rôle n’est pas le même.
 
1) Le taux de cotisation
 
Dans les régimes en points ou en comptes notionnels, les droits acquis sont dépendants des cotisations versées. Aussi, en augmentant le taux de cotisation, la pension de retraite sera elle-même plus élevée. L’effet contributif peut être tempéré par le taux d’appel dans
les régimes en points.
 
2) L’âge de départ en retraite

 
Dans les régimes en points et en annuités, l’âge de liquidation de la retraite permet de faire varier le montant de celle-ci par le système de la décote et de la surcote. Tandis que dans le système en comptes notionnels, le paramètre de l’âge est, par définition, intégré dans le coefficient de conversion. On ne parle alors plus d’âge légal mais d’âge pivot.
 
3) La durée d’activité
 
Dans les régimes en annuités, c’est l’élément principal. Dans les deux autres régimes, la durée d’activité va intervenir indirectement. En effet, plus la durée d’activité sera longue, plus les droits acquis seront importants.
 
4) Le taux de revalorisation

 
Dans les régimes en annuités, le taux de revalorisation est le même pour revaloriser les salaires pris en compte et les pensions liquidées. Dans les régimes en points, c’est la valeur du point qui permet de revaloriser les deux. Pour les régimes en comptes notionnels, les règles de revalorisation sont dépendantes de l’équilibre entre cotisations reçues et pensions versées.
 
Les trois types de régime peuvent être qualifiés de contributifs selon l’acception très large de la contributivité (existence d’un lien entre contributions et droits). Cependant, des éléments de solidarité peuvent être introduits quelle que soit la technique retenue.
 
En points et en comptes notionnels, aucun droit ne peut théoriquement être donné sans versement de cotisation équivalente et le droit octroyé est quantifiable au moment du fait générateur. Ce principe peut être altéré dans les régimes en points par l’attribution
de points « gratuits », par exemple en cas de maladie dans les régimes tels que l’AGIRC-ARRCO ne donnant pas lieu à financement préalable.
 
Quelle que soit la technique de calcul, tous les régimes permettent de développer des dispositifs de solidarité mais avec une différence essentielle. Dans les régimes en points et en comptes notionnels, il est aisé de déterminer, au moment du fait générateur du droit, sa contrepartie financière sous forme de montant de cotisation.

Tout droit octroyé sera utile et donnera lieu à un supplément de pension. En revanche, dans les régimes en annuités français, il est possible qu’un droit ouvert n’entraîne finalement pas une augmentation de pension (ce peut être le cas des majorations de durée d'assurance pour enfant) et sa contrepartie financière n’est pas toujours évaluable au moment du fait générateur.

La transition entre les régimes

La problématique est celle du passage d’un système à un autre et de convertir les droits acquis dans l’ancien système en droits dans le nouveau système. Différents types de transition sont possibles. 

La transition immédiate : ceci implique la disparition de l’ancien système et la conversion des droits acquis dans le nouveau système.
 
La transition progressive : les deux régimes continuent d’exister et, lors de la liquidation de la pension, on fait la somme des pensions des deux régimes.
 
La transition progressive avec affiliation successive
: lors de la liquidation de la pension, on fait comme si la personne avait successivement été affiliée dans les deux régimes
(méthode retenue par l’Italie).
 
Dans certains cas de transition, se pose le problème de la valorisation des droits acquis dans l’ancien régime, notamment si les données concernant les cotisations versées à l’origine ne sont pas disponibles.
 
La faisabilité doit être envisagée sous l’angle juridique et technique.
 
La faisabilité technique : c’est avant tout la disponibilité des données qui va conditionner le choix de la transition et du nouveau régime. Il faut aussi prendre en compte la formation des gestionnaires qui sera nécessaire pour passer dans le nouveau régime, sans oublier l’accompagnement indispensable pour l’information des droits des assurés.
 
La faisabilité juridique : a priori, selon le Conseil constitutionnel, il n’y a pas d’empêchement juridique à un changement de système.

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