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18 / 06 / 2025 | 8 vues
Régis Petit / Membre
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Mission sénatoriale d'évaluation de l'intercommunalité : surtout ne pas alimenter le ressentiment

« Certains maires, notamment ruraux, ne se sentent pas bien dans leur intercommunalité. Quelles sont vos préconisations pour améliorer les choses ? ». Voilà, en substance, la problématique posée par Maryse Carrère, sénatrice des Hautes-Pyrénées et rapporteure de la mission d'information chargée de faire le bila des lois NOTRe et MAPTAM et qui a auditionné l'ADGCF le 4 juin dernier.

 

Usant des précautions d'usage — « il ne s'agit pas d'instruire un procès à charge » — mais évoquant dans le même temps les « mariages forcés » et les « compétences sans cesse plus nombreuses » des intercommunalités », la lettre de cadrage, énoncée en liminaire par le président de la mission, Jean-Marie Mizzon, sénateur de la Moselle, a planté le décor mais également « ambiancé » les échanges.

 

La ligne de force de nos réponses : l'intercommunalité est une réussite. Son organisation demeure bien sûr perfectible, mais elle a su répondre à sa double vocation historique : d'une part pérenniser le tissu communal français —alors que nos voisins européens ont fusionné massivement leurs communes dans les années 60, 70 et 2000— tout en améliorant, d'autre part, la qualité de l'offre de services publics à destination des habitants. Dit autrement, non seulement l'intercommunalité permet aux maires de dialoguer plus facilement, mais elle rend la grande majorité des communes agissantes, la plupart des services d'intérêt collectif étant précisément aujourd'hui intercommunaux —70 % des compétences du bloc local—.

 

Au-delà, que dire sur les périmètres ?

 

D'un côté, les intercommunalités correspondent désormais globalement aux « territoires vécus » par nos concitoyens et trouvent une cohérence à l'exercice de compétences dépassant la commune, comme les mobilités, l'habitat, le développement économique et tout ce qui relève de la transformation écologique (dont l'aménagement et l'urbanisme). De l'autre, ces extensions ont généré des problématiques de gouvernance, donnant aux maires des petites communes la sensation de perdre le lien avec l'administration communautaire, mais aussi aux maires des villes centres, d'être isolés au sein de leur propre territoire. Pour l'ADGCF, la dynamique de fusion des intercommunalités aurait dû s'accompagner d'un plan de regroupement des communes afin de rééquilibrer le fonctionnement des territoires.

 

Que dire sur les compétences ?

 

Nous n'avons pas manqué, évidemment, de faire part de notre étonnement quant au « jusqueboutisme » du Sénat et des associations de maires en matière d'eau et d'assainissement, au regard de la plus-value avérée de l'intercommunalisation de la compétence en matière de mise à niveau des réseaux et ce, au bénéfice de nos concitoyens. Nous avons aussi rappel qu'avec la disparition progressive de l'ingénierie de l'État (DDE, DDAF...) dans les territoires, les services intercommunaux assumaient désormais ce rôle d'appui technique et de proximité auprès des maires. Dans tous les cas, pour l'ADGCF, revoir le socle de compétences intercommunales comme il l'a été suggéré lors de l'audition, c'est prendre le risque de rouvrir des débats tranchés de longue date et de détricoter ce qui est efficace et donne pleine satisfaction à l'habitant.

 

Enfin, que dire concernant la solidarité et les ressources des intercommunalités ?

 

Force est de constater l'intensification d'une logique très consumériste des communes vis-à-vis de l'intercommunalité qui se traduit par l'explosion de l'usage des fonds de concours et des dotations de solidarité communautaires. Dans ce contexte, l'ADGCF plaide pour la généralisation de pactes financiers et fiscal, des schémas de mutualisation et du plan pluriannuel d'investissement, ainsi que pour des attributions de compensation validées à la majorité qualifiée.

Plus largement, il faut, à nos yeux, faire de l'intercommunalité l'échelle de la péréquation, toutes les dotations transitant par l'intercommunalité selon le principe de la DGF territorialisée, leur redistribution intégrant des critères sociaux et écologiques. Enfin, au regard de leurs problématiques et au nom des solidarités, l'ADGCF soutient l'idée du déploiement dans les territoires ruraux des « communes-communautés », dispositif proposé par la sénatrice et désormais Ministre déléguée chargée de la Ruralité, Françoise Gatel...

 

Mes impressions à l'issue de cette audition ?

 

Une mission sénatoriale qui a le mérite de chercher à circonscrire les blocages au fonctionnement optimal des intercommunalités et les leviers susceptibles de les contourner mais qui se fait, également, le réceptacle d'un ressentiment vis-à-vis de l'intercommunalité. Élus débordés par la « technostructure », la « machine » ou le « rouleau compresseur » administratifs, posture des agents intercommunaux qui contribueraient à « marginaliser la voix des communes ».

Ces propos auxquels nous avons été confrontés, renvoient à une intercommunalité désormais clairement décrite comme subie plus que choisie.

A ce titre, il faut rester vigilant.

L'expression d'un ressentiment ne peut produire d'action politique viable mais tend essentiellement à alimenter un sentiment d'injustice faisant perdre tout discernement. N'oublions pas que l'intercommunalité repose toujours sur un affectio societatis, une intention de coopérer entre maires, au service d'un service public local qu'il nous faut à tout prix préserver.

 

 

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