Participatif
ACCÈS PUBLIC
14 / 03 / 2023 | 53 vues
Frédéric Homez / Abonné
Articles : 99
Inscrit(e) le 23 / 05 / 2012

Construire pour durer !

L’ère du tout-jetable et de la consommation effrénée appartiendrait-elle au passé ? Dans le secteur de l’électroménager, cela semble bien le cas. Les industriels, en partie en réponse aux attentes des consommateurs, misent sur le durable, économe et réparable. Pas question ici de green washing, l’avenir de la filière passe par sa mise au vert.

 

Selon une étude de la filière DEEE (Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques) en 2021, chaque foyer français possède à domicile près d’une centaine d’équipements électriques et électroniques, utilisés ou non, allant du réfrigérateur au téléphone, de la machine à laver au sèche-cheveux, pour une moyenne de 200 kg par habitant, qui jette chacun 20 kilos de déchets électroménagers par an.

 

Produire et utiliser ces biens a un impact significatif sur l’environnement : l’extraction des matières premières, la fabrication, la distribution, le fonctionnement et le traitement en fin de vie consomment des ressources et de l’énergie et rejettent des gaz à effet de serre : près de 500 kg d’équivalent CO2 sur l’ensemble du cycle de vie pour un lave-vaisselle standard.

 

Face à la montée des enjeux environnementaux et de leur traduction dans les modes de consommation, les producteurs n’ont d’autre choix que de miser sur l’éco-conception, la robustesse et la réparabilité. « Certains prix d’entrée de gamme ne sont pas beaucoup plus élevés que les prix des réparations. Tout l'enjeu est donc d’encourager à la réparation », fait d’ailleurs remarquer le Gifam. C’est aussi ce vers quoi poussent les évolutions réglementaires.

 

La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 10 février 2020 entend ainsi « accélérer le changement de modèle de production et de consommation afin de limiter les déchets et préserver les ressources naturelles, la biodiversité et le climat », peut-on lire sur le site du ministère de la Transition écologique.

 

Parmi ses principaux axes : mieux informer les consommateurs, lutter contre le gaspillage, agir contre l’obsolescence programmée et mieux produire. Le but global est d’inciter les consommateurs à faire réparer leur appareil plutôt qu’à en changer en cas de problème.

 

Concrètement, depuis le 1er janvier 2021, ordinateurs portables, smartphones, téléviseurs, machines à laver à hublot ou encore tondeuses à gazon électriques et bien d’autres produits doivent afficher leur indice de réparabilité (noté sur 10). Il vise à orienter les achats vers des produits plus facilement réparables, à inciter les fabricants à prendre la réparabilité en compte et à lutter contre l’obsolescence programmée. À l’horizon 2024, il se transformera en indice de durabilité par l’ajout de nouveaux critères comme la robustesse ou la fiabilité des produits.

 

La chasse au gaspillage

 

Autre élément à regarder à la loupe avant d’acheter : la consommation énergétique, dont la mesure a fait peau neuve.


Depuis la création de l’étiquette énergie en 1995, l’amélioration des performances des appareils et l’interdiction des plus énergivores l’avait rendue inadaptée au marché. Il avait fallu créer des nouvelles catégories (jusqu’à A+++), et pour certains appareils la classe A+ était la plus mauvaise autorisée sur le marché !


Une nouvelle étiquette énergie, au design renouvelé, a donc débarqué dans toute l’Union Européenne le 1er mars 2021 pour quatre catégories d’appareils (lave-vaisselle, lave-linge et lave-linge séchant, réfrigérateurs/congélateurs (y compris les caves à vin), téléviseurs et écrans). Pour ces appareils, fini les A+, A++ et A+++.

 

Les plus énergivores sont reclassés en « G », tandis que les premières classes sont devenues très exigeantes. La note intégrera progressivement des critères supplémentaires sur leur réparabilité et leur recyclabilité. La nouvelle étiquette comporte aussi un «QR code », qui permet en le scannant d’accéder à une base de données électronique des produits et ainsi de les comparer plus facilement. Alors que seules 40 % des pannes des produits électriques et électroniques donnent lieu à une réparation en France, l’objectif affiché est d’atteindre un taux de 60 % d’ici 5 ans.

 

Pour cela, il va aussi falloir regagner la confiance des consommateurs, mise à mal par la révélation au grand public il y a quelques années de la notion d’obsolescence programmée, du fait même des pratiques de ce secteur….

 

Acteurs du changement

 

Ici, certains distributeurs ont devancé l’appel et mis au point leur propre indice, qui permet de classer les produits et les marques selon leur durabilité et leur réparabilité. Ce faisant, ces distributeurs prennent en quelque sorte le pouvoir sur les constructeurs. Là où les normes techniques peuvent limiter les investissements des fabricants en matière de durabilité, le choix des consommateurs reste l’ultime prescripteur.

 

Or la mise en avant des produits “les plus fiables et les plus réparables” a un effet direct sur les ventes, qui peuvent être multipliées par 4 à 10 selon la catégorie ! Un argument marketing imparable et les industriels l’ont bien compris.

 

En France, Seb fait figure d’exemple : avec des pièces de rechanges fabriquées par millions ou imprimées en 3D, la marque assure la réparabilité de 97 % de ses produits (dont 67 % totalement). Si les industriels sont contraints par la loi de concevoir des appareils durables, le changement est aussi dans les mains des consommateurs.

 

Un autre aspect du dossier l’illustre bien : la connectivité. « Là encore, il s’agit de produits et de technologies de rupture qui redynamisent le secteur, explique le secrétaire fédéral Eric Keller. La connectivité n’est plus seulement un argument marketing mais démontre aussi une vraie utilité en termes d’économie d’énergie, de lutte contre le gaspillage ou de maintenance prédictive ; autant d’éléments qui réduisent à la fois coût pour le consommateur et empreinte écologique globale. »

 

Mais encore faut-il que les consommateurs s’en saisissent. Selon une enquête menée par le Wall Street Journal, acheter un appareil connecté est très loin d'être synonyme de connexion de ce dernier à internet. Interrogée par le média américain, la marque LG a fait valoir que 80 à 90 % de ses produits sont connectés.

 

Pourtant, à peine la moitié des acheteurs les connectent ensuite au Web. Oubli, paresse, crainte pour ses données et sa vie privée ; les explications ne manquent pas pour ce qui ne semble pas être une priorité des ménages. « L’industrie fait énormément pour accompagner la transition, tempère Eric Keller, mais elle ne peut pas dicter à chacun quel usage faire de possibilités offertes par les évolutions technologiques. »

 

Autrement dit, le consommateur est et restera un acteur majeur du changement et, in fine, du nouveau paysage industriel.

 

Diversification

 

Les nouvelles tendances et attentes sont des opportunités pour de nouveaux entrants, qui sont la clé de la réindustrialisation.


A l’instar du Bob de Daan Tech, leurs armes seront les produits et technologies de rupture qui cassent les codes et, ce faisant, démocratisent cette industrie en leur offrant une place mais créent aussi de nouvelles options pour des acteurs en quête de diversification.
 

Pour les professionnels de l’électroménager, les convergences offertes par les nouvelles technologies, présentes de manière transverse dans un nombre toujours plus grand de produits, sont également une opportunité de partir à la conquête de nouveaux secteurs, comme l’a fait Seb en se lançant dans le vélo électrique sur son site de Dijon.

 

Pour les salariés, surtout, c’est la possibilité de passer plus facilement d’un secteur à un autre grâce à une certaine standardisation des savoir-faire, des outils et des composants.

 

A suivre...

Pas encore de commentaires