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04 / 12 / 2020 | 214 vues
François Cardin / Membre
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Sécurité des travailleurs : les principaux secteurs confrontés à cet enjeu

Le thème de la santé et de la sécurité au travail n’aura sûrement jamais autant été au cœur de l’actualité qu’au cours de cette pandémie de covid-19. Cette crise est l’occasion de revenir sur les autres dimensions de la protection des salariés dans des secteurs d’activité par nature exposés à d’importants risques. Du BTP à l’énergie en passant par l’industrie, certaines entreprises leaders dans leur secteur veulent aujourd’hui également l’être dans la protection de leurs salariés. Au cœur des enjeux : la préservation de leur capital humain, financier et réputationnel.

La sécurité des travailleurs ne doit pas être bradée

 

Le secteur tertiaire particulièrement exposé
 

D’après le rapport annuel 2018 de sinistralité publié par l’assurance maladie, 651 103 accidents du travail ont été reconnus cette année, soit 34 accidents du travail pour 1 000 salariés et 551 personnes sont même décédées du fait de ces accidents. Ces chiffres et plusieurs affaires ayant fait grand bruit pressent les pouvoirs publics et les entreprises à se mobiliser afin de mieux assurer la sécurité des travailleurs.
 

Derrière les notions de santé et de sécurité au travail se cachent des situations hétéroclites (maladies du travail, accidents du travail et accidents de trajet) qui ouvrent chacune droit à une reconnaissance et à une réparation distincte. Pour autant, les conséquences humaines, financières et sur la réputation de la santé et de la sécurité au travail peut se révéler très lourd pour les entreprises, a fortiori dans les secteurs d’activité particulièrement « accidentogènes ».

Le rapport de l’assurance maladie précité rappelle ainsi que parmi les trois risques responsables d’une majorité d’accidents du travail et de maladies professionnelles figurent les risques chimiques et les chutes dans le BTP. Ce dernier secteur est l’un des plus sinistrés, avec 56 accidents du travail enregistrés pour 1 000 salariés et plus de 6 millions de journées de travail perdues en 2018. Le coût, direct et indirect des accidents du travail et des maladies professionnelles du secteur est estimé à 5 % du coût des ouvrages bâtis. Bien que dépourvus de statistiques officielles, les secteurs de l’énergie et de l’industrie sont également particulièrement concernés, comme l’illustre par exemple la série d’accidents du travail qui a touché le sidérurgiste Arcelor Mittal en 2015.
 

Le phénomène est malheureusement ancien et un grand acteur du secteur de la construction comme Eiffage a mis tout un système de prévention des accidents en place, avec « zéro mort » pour objectif. Eurovia essaye également d’englober tous les risques inhérents à ses activités en donnant des équipements obligatoires de protection à ses opérateurs et en allant plus loin avec des vêtements filtrant les rayons UV, des marteaux absorbeurs d’inertie et des engins lourds équipés de caméras. Désormais, les professionnels de la construction et de l’industrie établissent des stratégies pensées et résolument actives en matière de prévention.
 

Une prise en compte des accidents du travail intégrée à la stratégie d’entreprise
 

Épinglé pour avoir essayé de dissimuler des accidents du travail, EDF a été confronté à une couverture médiatique désastreuse et de potentielles actions en justice coûteuses. L’énergéticien a alors radicalement changé de braquet et fait de la prévention des risques et de la protection des salariés un véritable pilier de sa stratégie. De poste de coût, la prévention des accidents du travail s’est transformée en réputation de l’énergéticien, tant auprès du public que de ses collaborateurs. L’entreprise fait aujourd’hui du « développement humain » l'un des six objectifs de responsabilité d’entreprise de son projet stratégique CAP2030, au même titre que la lutte contre le changement climatique ou la promotion de l’efficacité énergétique.

 

Le groupe se fixe pour objectif d’être une référence en matière de santé et de sécurité, via deux priorités : durablement éradiquer les accidents mortels dans le groupe et préserver la santé et la sécurité de l’ensemble de ses salariés, sous-traitants et parties prenantes. EDF adopte donc une interprétation extensive de la santé et de la sécurité au travail, qui inclut ses prestataires et sous-traitants, et a notamment inclu la prévention des pratiques addictives dans son champ d’action.

 

Chez Arcelor Mittal également, les leçons semblent avoir été tirées de la série noire d’accidents du travail mortels survenue en 2015. Les usines du sidérurgiste avait compté trois accidents mortels, terni l’image du groupe et ouvert une procédure judiciaire. Le volet de santé et de sécurité au travail s’inscrit dorénavant dans le plan de vigilance d’Arcelor Mittal en France et vise l’objectif de zéro accident, dommage corporel ou maladie professionnelle. Parmi les mesures prises, le lancement du programme de formation « take care », dédié à la détection des risques et organisé durant une vingtaine de jours répartis sur plusieurs années.

 

Arcelor Mittal organise également des journées consacrées à la santé et à la sécurité à l’occasion de la fête du travail. Organisées pour plusieurs milliers de ses collaborateurs sur le site de Fos-sur-Mer, ces journées sont l’occasion pour l’entreprise de présenter les équipements de sécurité à ses collaborateurs (gilets rafraîchissants, tenues de haute visibilité…) développés pour faire face aux spécificités du métier et de rappeler les bonnes pratiques. Une manière d’assurer le même niveau de vigilance pour l’ensemble des collaborateurs du groupe et de tourner la page d’une annus horribilis sur le plan humain et médiatique.

 

2020 pourrait bien être une annus horribilis pour le constructeur d’avions, d’équipements et de systèmes aéronautiques, Daher. L’entreprise familiale a récemment dépassé le statut d’ETI grâce à de nouveaux contrats et embauches mais la crise qui frappe l’aviation pourrait revoir les plans d’un acteur qui a fait des efforts importants pour assurer la sûreté de tous ses salariés. Répartis sur plusieurs sites, ils travaillent pour beaucoup dans des conditions dangereuses, avec des produits extrêmement lourds qu’il faut manipuler et déplacer dans un environnement bruyant. C'est particulièrement vrai sur le site de Maville (Loire-Atlantique), racheté en 2013 par l’entreprise familiale et qui a dû être repensé afin d’assurer une sûreté optimale pour ses salariés. Un programme sur quatre axes (risque chimique, chute de hauteur, circulation et déplacement et conditions de travail/ergonomie et culture de sécurité) a été mis en place dès 2015. Un réel succès.
 

Dans le BTP, la « sécurité par le design » au service de la protection des ouvriers
 

Grand pourvoyeur d’accidents du travail, le BTP cherche des solutions pérennes que certains acteurs ont peut-être déjà trouvées. Le spécialiste français du préfabriqué en béton, KP1, a mis un coordinateur de prévention et de sécurité en place dans chacune de ses usines principales, lequel renforce le poste de responsable de la qualité, de la sécurité et de l'environnement (RQSE). Cette prise de conscience déjà ancienne et sans cesse renouvelée a permis d’éviter des drames et des affaires dans lesquelles le secteur du BTP s’est parfois enfoncé et dont il n’est pas à l’abri. Les relais de prévention mis en place par KP1 sont à l’origine de la création de l’organisation mensuelle de « quarts d’heure de sécurité », lesquels se tiennent aussi après tout accident, sur tous les sites, ou de la mise en place de fiches standardisées des postures de sécurité à adopter sur les outils et produits du groupe.
 

Au-delà de l’aspect de prévention, KP1 l’une des rares entreprises du BTP à déposer des brevets, mise sur la sécurité par le design de ses produits. Par exemple, la société intègre des inserts de sécurité à ses prédalles, poutres et prémurs, permettant une manipulation et un montage sécurisés de ces éléments potentiellement dangereux à manipuler. Parmi les autres innovations relevant de cette sécurité par le design : le lancement d’une gamme de dalles disposant d’inserts pour l’insertion facile des garde-corps et de planchers intégrant des éléments antidérapants. Les usines du groupe sont également outillées de machines d’aide mécanique à la manutention, permettant de limiter les risques de troubles musculo-squelettiques pour les ouvriers manipulant des charges lourdes.

 

Cette volonté de prévenir les risques et les accidents constitue un poste de dépenses conséquent. Ces innovations techniques et managériales suscitent une véritable adhésion des salariés et renforce ainsi la compétitivité du groupe dans un secteur où le renouvellement est souvent important et empêche d’acquérir les bons réflexes en termes de prévention. Quel que soit le secteur, la confiance des salariés est synonyme d’un travail plus abouti et de qualité. Les entreprises ont donc tout intérêt à veiller à la sécurité et aux bien-être de leurs salariés et prestataires.

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