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02 / 11 / 2020 | 174 vues
Jean Paul Philidet / Abonné
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Un livret de rééducation des masses laborieuses au Ministère des Finances

Les nouvelles méthodes de management préconisées par le directeur général de la DGFIP consistent à manipuler et mettre les récalcitrants au placard.
 

Le 18 septembre dernier, notre syndicat a eu vent de l’organisation d’une journée nationale de sensibilisation à la transformation à la destination des cadres de la DGFiP. À cette occasion, un guide de 22 pages intitulé « Faire face aux défis de la transformation – livret manager – Accompagnement des cadres de la DGFIP à la transformation» leur a été remis.


Sans pour autant l’accepter, nous avions déjà compris que le nouveau réseau de proximité (NRP) devait être avalé coûte que coûte, quitte à évincer des cadres méritants de leurs postes comptables ou, comme dans le Puy-de-Dôme, attendre le 15 décembre pour informer les agents de leur affectation au 1er janvier 2021. Mais là, c’est l’apothéose ! La DGFIP aura donc droit à son livret de rééducation des masses laborieuses.
 

Avec la complicité des cabinets de conseil Alixio et Accenture, sans doute grassement rétribués (combien ? L’histoire ne le dit pas), la direction générale veut donc faire porter sa sale besogne par ses cadres de proximité. Comme si ces derniers, à l’instar de leurs collaborateurs, n’étaient pas déjà suffisamment mis sous pression...
 

Ils se débattent déjà entre des injonctions paradoxales. Ils doivent remplir les objectifs fixés, s’en expliquer s’ils ne les atteignent pas et parallèlement mettre une organisation en place préservant la santé physique et mentale de leur entourage professionnel. Cette réalité quotidienne devient de plus en plus difficile à assumer, au sens où il devient de plus en plus problématique de concilier des priorités contradictoires. Il leur est sans cesse demandé de faire mieux avec moins et d’être à la hauteur de la conduite du changement mais ce n’est certainement pas en appliquant les préceptes de ce guide à la lettre qu’ils réussiront à garder de la cohésion entre eux et leurs équipes et entre les agents eux-mêmes.
 

Nauséabond au possible, ce « livret manager » est aussi et surtout nocif pour toute la DGFIP tant certains de ces concepts qui y sont véhiculés ont été pointés du doigt lors du procès de France-Télécom. Ainsi, les cadres de proximité seront évalués sur leur propension à faire passer la « transformation » auprès de leurs équipes. S’ils n’y arrivent pas, ils seront considérés comme de mauvais « coaches ». Les agents ne sont pas oubliés puisqu’ils seront classés en trois catégories : les « alliés », les « opposants » et les « passifs, hésitants ».

 

Morceaux choisis et nos commentaires
 

Page 2 sur 22 : la conduite du changement engendre des résistances.
 

C’est un scoop mais encore fallait-il qu’un cabinet de consultants le dise ! La DGFIP a t- elle prévu un avenant au contrat afin que le cabinet aille aussi démarcher les élus récalcitrants et les populations rurales notamment ?
 

Page 4 sur 22 : Cette démarche doit permettre de repérer les populations sur lesquelles s’appuyer.
 

S’appuyer sur les agents qui font la promotion du projet. Que veut le directeur général ? Des agents ou des VRP zélés du NRP ? C’est la carotte et le bâton, seul vieux précepte managérial qui fonctionne.

 

Page 7 sur 22 : la carte des « alliés » :

• engagés/constructifs,

• passifs/déchirés/hésitants,

• opposants/irréductibles.

 

Trois catégories de personnel :

• les premiers auront les meilleures évaluations, promotions etc. ;

• les deuxièmes devront choisir leur camp à un moment donné ;

• les troisièmes verront leurs possibilités d’avancement de carrière ralenties.

 

Page 8 sur 22 : La « courbe du changement ».

 

L’adaptation à un changement majeur passe par différentes étapes et décrit souvent une courbe, comme illustré dans ce diagramme inspiré des travaux d’Élisabeth Kübler-Ross sur le deuil. Cette courbe a été développée par une psychiatre qui travaillait sur les différentes phases par lesquelles les gens en soins palliatifs acceptaient leur propre mort.

Ça a été introduit dans le monde du management pour identifier les phases psychologiques chez ceux vivant mal le changement. Chez France-Télécom, cela a été dévoyé en disant aux managers que leurs équipes passeraient par la colère et la dépression mais que tout ceci relevait d’un processus normal. Cette « courbe du deuil » utilisée chez France-Télécom avait été pointée du doigt par l’observatoire du stress et des mobilités forcées, créé par les syndicats et les salariés de France-Télécom en juin 2007. Voilà donc le merveilleux outil dont le directeur général veut nous doter !

 

Page 11 sur 22 : Le manager devient un « coach » qui accompagne les équipes, il donne du sens et devient un facilitateur.

 

Tout ceci est proprement injurieux envers les cadres de proximité qui, d’après ce livret, ne faisaient rien de tout ça jusqu’à ce jour.

 

Page 15 sur 22 : Comment « manager » des équipes dispersées ? Quelques bonnes pratiques.

 

Enfoncer des portes ouvertes sur la nécessité de faire des réunions et des moments de convivialité.

 

Page 17 sur 22 : Quelle posture pour le manager ?

 

La direction générale essaie de nous faire croire que le cadre de proximité dispose de marges de manœuvre, alors qu’il n’en est rien.

 

Pages 18 à 21 :

Exemple de canevas pour mener le changement.

Embarquer les équipes et décliner la vision.

On tombe dans les poncifs du genre : communiquer, associer les agents et initier les actions.

Même si le ridicule ne tue plus depuis longtemps, ce livret « manager » et les réunions qui commencent en province relèvent d’une vaste opération de propagande visant à vendre le NRP  et à culpabiliser ceux qui le critiquent. Cette odieuse opération marketing doit être stoppée et le NRP abandonné.

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