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26 / 04 / 2016 | 2 vues
Claudine Gautronneau / Abonné
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Pensions de l’État : comprendre pour défendre

Selon une enquête publiée par la PREFON (Caisse nationale de prévoyance de la fonction publique) en décembre 2015, 34 % des agents de la fonction publique seraient favorables à se voir appliquer les règles du privé en matière de retraite.

Bien évidemment, les médias ont mis en exergue qu’un fonctionnaire sur trois serait prêt à passer dans le régime général d’assurance vieillesse.

Omettant au passage que 24 % de fonctionnaires étaient totalement opposés à cette idée, ils ont surtout occulté que 42 % des fonctionnaires interrogés ne s’étaient pas prononcés faute d’une connaissance suffisante du dossier.

Cela confirme que de nombreux fonctionnaires ont aujourd’hui une méconnaissance sérieuse de leur pension de retraite, d’autant plus que les réformes qui se sont succédées ont compliqué les modalités de liquidation, apportant ainsi un peu plus de confusion sur les droits de chacun.

En outre, un discours constamment à charge contre leur régime de retraite tend à culpabiliser les fonctionnaires afin de les amener là où ceux qui ont décidé d’en finir avec les conquêtes sociales de la Libération veulent les emmener : à l’abandon pure et simple de leur statut.

Le syndicat FO-DGFiP est donc pleinement dans son rôle lorsqu’il informe les agents des finances publiques sur le régime de retraite des fonctionnaires qui est le leur.

Informer pour mieux revendiquer et agir reste un principe de base de notre organisation syndicale. Il convient donc de faire un rapide historique pour mieux comprendre d’où viennent les spécificités de notre système de retraite et combattre certaines idées erronées.

La pension de retraite est un élément du statut des fonctionnaires

Le droit à un traitement versé au-delà du service actif est apparu au XVIIème siècle. Il a mis plus de deux siècles à se mettre en place, traversant les régimes politiques. Ce principe du traitement continué est fondateur du statut des fonctionnaires d’État mais tous le personnel au service de l’État n’a donc pas été traité de manière identique et simultanément dans le temps.

En effet, les dispositions retenues ont pu être très variables en fonction de l’époque, de l’importance des groupes concernés et de l’organisation politique même de l’État. Rappelons que le premier régime de pensions connu, celui des marins de la « Royale », a été mis en place en 1673 par Colbert, Louis XIV étant Roi de France, pendant que celui des ouvriers d’État date de 1897, sous le gouvernement de Jules Méline, alors que Félix Faure était Président de la IIIème République.

Au cours de la première moitié du XIXème siècle, on a assisté à une multiplication des caisses de retraites. Ainsi, pour la seule administration des finances, sept caisses de retraite différentes, toutes placées sous l’autorité du ministre, ont été créées entre 1800 et 1808, sous le Consulat et le Premier Empire.

La loi du 9 juin 1853 a institué un système unique de retraite géré par le Trésor Public.

La loi du 9 juin 1853 (sous le Second Empire donc) a mis un terme à cette organisation pléthorique et a institué un système unique de retraite fonctionnant selon des règles budgétaires et octroyant sous certaines conditions une pension de retraite.

L’article 1er de la loi du 9 juin 1853 a supprimé toutes les caisses de retraite existantes et attribué leurs actifs à l’État.

L’article 2ème a décidé de l’inscription au livre de la dette publique des pensions précédemment à la charge des caisses. Le Trésor Public est chargé de centraliser la gestion des pensions qui ne sont plus alimentées par des cotisations sur traitements mais par des retenues qui sont intégrées dans les recettes pendant que les pensions s’inscrivent désormais comme des dépenses générales de l’État.

La loi de 1853 prévoit également que les pensions sont octroyées en fonction de l’âge et de la durée de services, quelles que soient les sommes versées par le fonctionnaire au cours de sa carrière. Le droit à pension est effectivement ouvert à 60 ans après 30 années de services pour fonctionnaires sédentaires ou à 50 ans après 25 ans de services actifs.

La pension devient un droit

La pension de retraite cesse donc d’être une rente viagère provenant d’un capital constitué par le fonctionnaire avec une participation de l’État (comme la RAFP aujourd’hui) car elle devient un véritable droit, élément de son statut.

La loi de 1853 a également introduit le principe de la retenue sur traitement qui n’a aucun lien avec la pension versée mais qui doit être considéré « comme une sorte d’impôt spécial destiné à rendre le service des pensions moins onéreux pour le Trésor ».

Pour compléter ce rapide historique, il faut savoir que c’est la loi du 14 avril 1924 présentée par le gouvernement de Raymond Poincaré (Alexandre Millerand était alors Président de la République) qui a instauré un régime commun de pensions civiles et militaires de retraites. Ce texte a créé la distinction entre la pension d’ancienneté et la pension d’invalidité et a disposé que les femmes fonctionnaires mariées ou mères de famille, ayant accompli 15 années au moins de services effectifs, pouvaient bénéficier d’une pension de retraite. En outre, elle a mis en place la pension de réversion pour les veuves et orphelins de fonctionnaires.

La loi de 1924 a introduit un principe nouveau : la revalorisation des pensions basée sur la hausse des traitements et plus sur la dépréciation monétaire.

Tous les paramètres que nous connaissons aujourd’hui étaient en place, même si le code des pensions a été remanié à plusieurs reprises au cours des décennies suivantes.

Le statut général de la fonction publique promulgué par la loi du 19 octobre 1946 a consolidé la particularité du régime des pensions de la fonction publique et le gouvernement d’Henri Queuille (Vincent Auriol étant alors le premier Président de la IVème République) par la loi du 20 septembre 1948 a posé le principe du calcul de la pension de retraite sur la base de l’indice détenu pendant les 6 derniers mois de carrière.

Ainsi, il n’est pas interdit d’estimer que c’est la mise en place d’un système de retraite spécifique aux fonctionnaires de l’État qui a été l'une des causes du progrès social en ouvrant la voie au régime général de retraites en France.

C’est bien pourquoi ce système est aujourd’hui constamment attaquée par ceux qui nous vendent les conditions sociales du XIXème siècle comme un symbole de la modernité.

Quelques principes généraux relatif à la pension de retraite des fonctionnaires de l’État

Les fonctionnaires de l’Etat bénéficient d’une pension de retraite de fonctionnaire lorsqu’ils ont accompli au moins 2 années de services civils et militaires (toutefois, cette condition n’est pas imposée en cas d’invalidité).

Pour obtenir la mise en paiement de sa retraite, l’agent doit d’abord avoir été radié des cadres de l’administration, soit à sa demande lorsqu’il sollicite son admission à la retraite ou donne sa démission, soit d’office s’il a atteint l’âge de cessation obligatoire d’activité ou en cas d’invalidité.

La pension des agents de l’État est attribuée par le service des retraites de l’État (SRE), service attaché à la Direction générale des finances publiques (DGFIP).

Pension de retraite du fonctionnaire des finances publiques

La pension de retraite d’un agent des finances publiques comporte plusieurs éléments :
  • la pension de retraite principale, assise sur le traitement indiciaire brut détenu au cours des 6 derniers mois d’activité ;
  • un supplément de pension de retraite pour ceux qui ont bénéficié d’une nouvelle bonification indiciaire (NBI) géographique ou fonctionnelle. Le supplément de pension est égal à la moyenne annuelle de NBI perçue, multipliée d'une part par la durée de perception de cette bonification exprimée en trimestres selon les modalités prévues pour la pension elle-même et, d'autre part, par le taux auquel peut être rémunéré chaque trimestre l'année d'ouverture du droit ;
  • la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), régime obligatoire issu de la réforme des retraites de 2003. Instaurée au 1er janvier 2005, par le décret n° 2004-569 du 18 juin 2004, elle se calcule en valeur de service des points ;
  • un supplément de pension de retraite au titre de l’indemnité mensuelle de technicité des finances, égale au maximum à 75 % de son montant en fonction de la durée des services effectués.
L’indemnité mensuelle de technicité (IMT), issue du conflit social de 1989 aux finances, avait été octroyée de manière forfaitaire à tous les fonctionnaires du ministère des finances, quels que soient leur grade et leur ancienneté. Depuis 2009, les agents des finances publiques bénéficient d’un complément d’IMT au titre de la fusion.

Aujourd’hui, l’IMT versée à la DGFiP est d’un montant mensuel de 101,98 € et le taux de retenue pour pension est de 20 %.

Taux de la retenue pour pension civile

La retenue pour pension civile qui, rappelons-le, n’est pas une cotisation ouvrant droit à pension, est appliquée uniquement sur le traitement indiciaire.

Depuis la réforme des retraites de 2010, le taux de la retenue a régulièrement augmenté tous les ans sous prétexte d’un alignement sur le régime du privé !

L’article 11 du décret 2014-1531 du 17 décembre 2014 a fixé l’évolution des taux de retenue pour pension jusqu'en 2020.

Évolution des taux de retenue pour pension
  • 1er janvier 2016 : 9,94 %
  • 1er janvier 2017 : 10,29 %
  • 1er janvier 2018 : 10,56 %
  • 1er janvier 2019 : 10,83 %
  • 1er janvier 2020 : 11,10 % 

Régime des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers

De leur côté, les employés et agents des départements, des communes et des établissements publics, qui relèvent de milliers de caisses de retraite locales, sont traités comme les fonctionnaires d’État et soumis à la loi d’homogénéisation des retraites du 3 juillet 1941 (Gouvernement de Vichy) qui fixait que ce personnel ne pouvait bénéficier d’avantages supérieurs à ceux consentis par les régimes de retraites des fonctionnaires et agents de l’État.
Cependant, après la Libération, c’est le Gouvernement Provisoire de la République Française qui a créé, par ordonnance du 17 mai 1945, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). 

Le dossier technique et plus complet sur ce dossier spécial publié dans le dernier numéro de la revue Le Syndicaliste FO DGFIP est disponible sur demande à : contact@fo-dgfip.fr.

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