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27 / 07 / 2015 | 24 vues
Florence Vielcanet / Abonné
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Qui a intérêt à voir disparaître l'actuel état-major de la Crepa ?

Les tensions sur le marché de la protection sociale s'exacerbent au fur et à mesure que se propage l'information. Toute entreprise est désormais libre de son choix en complémentaire de santé et prévoyance, quels que soient les conseils ou les directives de sa branche professionnelle.

Malgré des jurisprudences récentes qui jettent une ombre sur cette liberté, mutuelles, institutions, assureurs et banques fourbissent leurs armes pour attaquer ce marché qui représente 35 milliards d'euros. Certains cherchent à déstabiliser leurs concurrents dans l'entreprise, auprès des branches comme au national. Icône de cette politique, les attaques sur la gestion de la Crepa (caisse professionnelle de prévoyance des salariés de cabinets d'avocats) surgissent de nulle part depuis deux ans. Elles se sont matérialisées, par une série d'articles dans le Canard Enchaîné, L'Argus de l'assurance, le blog d'Éric Verhaeghe et relayées par des tracts envoyés aux cabinets d'avocats.

Dans le colimateur de la presse, l'emploi de membres de la famille de la présidente par la Crepa, celui d'un membre de la famille du directeur de la communication et des « gabegies » dans la gestion.

Si ces accusations donneront lieu à des jugements à la rentrée, il faut néanmoins souligner qu'elles cachent de gros intérêts financiers.

Qui a intérêt à voir disparaître l'actuel état-major de la Crepa ?

  1. Les grands cabinets parisiens anciens conseillers juridiques (au nombre d'une dizaine) auxquels la Crepa réclame 5 millions d'euros. Ces cabinets contreviennent à la convention collective nationale des salariés des cabinets d'avocats, qui leur fait obligation de cotiser depuis 1992, date de la fusion de la profession de conseil juridique avec la profession d'avocat.
  2. Le groupe Humanis qui s‘offrirait bien la Crepa pour éteindre sa dette évaluée à plusieurs dizaines de millions d'euros (en mai dernier, l'expert judiciaire désigné par le TGI de Paris a confirmé un préjudice de plusieurs millions d'euros en faveur de la Crepa à l'encontre d'Humanis). Ce préjudice correspond aux fautes actuarielles graves du groupe Apri, devenu aujourd'hui Humanis, dans la gestion des régimes retraites et prévoyance de la Crepa entre 2000 et 2005.
  3. Les concurrents commerciaux de la Crepa car la complémentaire de santé vendue par la caisse des salariés des cabinets d'avocats aiguise les appétits dans un monde de la protection sociale très concurrentiel.
  4. Les syndicats d'employeurs et de salariés car la Crepa ne participe pas à leur financement. Elle n'a pas de budget consacré au financement syndical ou patronal, à la différence de la majorité des autres caisses. Le fonds de financement du paritarisme géré par l'ADDSA sert à rembourser des quote-parts de salaires et des pertes de gains des personnes présentes lors des réunions paritaires.


Des questions de personnes viennent aussi se rajouter à ce dossier financier des plus complexes.

  • L'un des principaux détracteurs de la Crepa, Michel Gonelle, a tenté de prendre la tête du syndicat patronal (ABF) du nouveau président de la Crepa, François Toucas, et la justice lui a fait interdiction de se prévaloir du titre de président de ce syndicat (jugement du TGI de Paris, section quart sociale, janvier 2015). 
  • Deux avocats détracteurs de la Crepa, Gilles Briens et Bruno Serizay, ont été exclus par le conseil d'administration de la caisse pour conflit d'intérêts. Ils sont conseillers d'Humanis en procès avec la Crepa et ont été suspendus de leurs fonctions d'administrateurs.
  • Des opposants à la Crepa luttent contre les clauses de désignation alors que la Crepa les défend avec deux syndicats d'avocats et de salariés de la branche. Or, la disparition de ces clauses va faire changer de main une partie du marché de la protection sociale, ce qui représente d’énormes masses d’argent.

Jamais des accusations lancées dans la presse sociale n'auront donné lieu à autant de procès en diffamation ou de droits de réponse rectificatifs. La protection sociale devient un sujet hautement risqué pour les journalistes à cause des intérêts d'argent qu'il masque et de la concurrence qui s’attise.

Un exemple d’accusation

Dans son édition du 15 juillet 2015, le Canard Enchaîné publiait un article « Repus de famille à la Caisse de retraite » remettant gravement en cause la gestion de la Crepa en s’appuyant sur des extraits de constats provisoires formulés par l’Autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR) et non de la Banque de France qui n’a pas compétence pour contrôler les organismes d’assurance, dans un projet de rapport de contrôle pour l’heure hautement confidentiel (le rapport définitif de l’ACPR n’est à ce jour pas connu).

  • Non seulement l’article du Canard a été publié dans l’ignorance du respect du principe du contradiction et en violation la plus élémentaire de la présomption d’innocence civile mais les éléments rapportés ne reflètent pas le projet de rapport de contrôle auquel la Crepa a, au demeurant, apporté point par point des réponses circonstanciées.

Sur la mauvaise gestion de la Crepa de son activité de prévoyance, il est important  de mentionner que les conséquences finales des constats opérés représentent moins de 1% de provisionnement prudentiel sur des engagements de l’ordre de 50 millions d’euros la fin 2014.

  • Ce 1% de 50 millions d’euros doit également être apprécié à la lumière des 980 millions d’euros d’engagements de la Crepa, tous régimes confondus !

Concernant son régime de retraite supplémentaire, l’avance de 2,3 points sur son plan de provisionnement (soit près d’un an d’avance) démontre également la bonne gestion du régime.

Quant à la « fièvre acheteuse » immobilière de la Crepa, outre le fait que les transactions ont été réalisées dans la plus grande transparence après validation du conseil d’administration et approbation de l’assemblée générale de la Crepa, qu’une information systématique en ait été faite à l’ACPR dans le cadre de son contrôle permanent et aux commissaires aux comptes de la Crepa, ces dernières ont été réalisées en dessous des prix de marché ce qui permet à la Crepa d’afficher une plus-value latente de plus de 7,7 millions d’euros et un rendement moyen de 4,25% en 2014.

Des rapports annuels d’expertise, dont les conclusions sont transmises chaque année à l’ACPR, attestent des plus-values et du rendement moyen précités mais également de la surface des biens propriétés de la CREPA. Ainsi, le logement mentionné par l’article a bel et bien été évalué à 43m2, conformément au bail consenti. Ces rapports confirment également un prix de location conforme au marché.

Ainsi, en dix ans et notamment grâce aux placements immobiliers réalisés, la solvabilité de la Crepa a évolué de manière significative : des fonds propres multipliés par 5 permettant de couvrir près de 2 fois l’exigence réglementaire sous Solvabilité II et près de 3 fois sous Solvabilité I.

De même, il est erroné de faire croire que la Crepa verse des « indemnités de sujétions » à ses administrateurs sur les fonds de ses régimes. En effet, seuls les frais de déplacements et de séjours sont remboursés, conformément à la législation et selon les règles définies par le conseil d’administration, par la Crepa à ses administrateurs dans le cadre de leur mission.

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