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03 / 05 / 2010 | 19 vues
Reixludwig Patricia Renée / Membre
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Le congé de maternité ne passera pas de 16 à 20 semaines...

Alors que les femmes sont largement sous-représentées à l'Assemblée nationale, seules des femmes ont débattu pour défendre ou combattre le projet de loi visant à modifier la durée du congé de maternité.

Mme Valérie Boyer,
Mme Isabelle Vasseur, Mme Marie-Françoise Clergeau, Mme Cécile Dumoulin, Mme Martine Pinville, Mme Catherine Quéré, Mme Danielle Bousquet, rapporteure, et Mme Nadine Morano, Secrétaire d’État ont présenté leurs arguments pour ou contre l'adoption de cette proposition.

Finalement, le débat n'a pas été long et la proposition a été rejetée en première lecture à l'Assemblée nationale le 25 mars 2010. Retour sur un débat complexe.

La France loin d'être le meilleur élève en Europe

Il faut comparer ce qui est comparable mais force est de constater que la France ne dispose pas d’une législation des plus protectrices dans l’Union européenne, que ce soit en termes de rémunération ou de durée du congé de maternité.

Selon les dernières sources parlementaires :« La durée du congé français (pour le premier et le deuxième enfants) est inférieure à celle accordée au Portugal, au Royaume-Uni, en Irlande, en Grèce, en Finlande (18 semaines réservées à la mère et 26 pour le père ou la mère), en Italie (20 semaines) ou au Danemark (28 semaines) ».


Devant des législations européennes diverses et parfois peu protectrices de la santé des femmes, la Commission européenne a lancé une initiative forte en proposant une directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de la directive 92/85/CEE du Conseil, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail [Com(2008) 600/4].

Pour la Commission européenne : dix-huit semaines minimum de congé maternité

Dans la présentation de sa proposition, la Commission européenne expose qu'« en raison de la vulnérabilité de la travailleuse enceinte, accouchée ou allaitante, il est nécessaire de lui accorder le droit à un congé de maternité d’au moins dix-huit semaines continues, réparties avant et/ou après l’accouchement, et de rendre obligatoire un congé de maternité d’au moins six semaines après l’accouchement ».


La Commission européenne suit, dans sa proposition, l’Organisation internationale du travail, qui recommande l’adoption d’un congé de maternité d’une durée minimale de 18 semaines. Elle propose en outre, de modifier la règle relative à la rémunération accordée pendant le congé maternité, prévoyant le principe de l’octroi du salaire mensuel complet perçu avant le congé maternité.

En France : différents droits selon les conventions collectives, source d'inégalités

De son côté, la législation française prévoit une durée du congé de maternité variable, selon le nombre d'enfants à charge de la salariée, le rang de l'enfant dans la famille, le nombre d'enfants à naître (naissance unique ou multiple) et le caractère normal ou pathologique de la grossesse ou de l'accouchement (C. Trav., art. L. 1225-18 et L. 1225-19). Elle peut être allongée par la convention collective. Pour le premier et le deuxième enfants, la durée « normale » du congé est de 16 semaines. Soit deux de moins que les préconisations de la Commission.

Par ailleurs, la salariée bénéficie pendant le congé de maternité de l’allocation journalière prévue dans l’article L. 333-1 du Code de la Sécurité sociale. Cette allocation est plafonnée et beaucoup de femmes ayant un salaire au-dessus du plafond de la Sécurité sociale ne bénéficient pas d'un maintien complet de leurs revenus.

Côté employeurs, il n'existe aucune obligation légale obligeant ces derniers à verser un complément de salaire pendant le congé de maternité. Celui-ci dépend des accords passés dans le cadre des conventions collectives. Or, beaucoup d'entre elles ne prévoient aucun maintien du salaire, notamment dans les secteurs historiquement fortement masculinisés. Il en ressort, dans notre droit national, une source d’inégalités entre les femmes selon les secteurs d'activités.

Quid des femmes exerçant une profession libérale ?

Il convient aussi de prendre en considération la situation des femmes qui exercent des professions non salariées (chefs d’entreprise, artisans, conjoints collaborateurs). Elles ne peuvent actuellement mettre durablement entre parenthèses leur activité au risque de mettre en danger leur entreprise. La législation française apparaît très insuffisante pour permettre à ces femmes de mener à bien leur maternité et vivre pleinement cette expérience. De ce fait, elles se trouvent trop souvent contraintes de reprendre rapidement leur travail, bien avant le terme légalement fixé pour les salariées.

Une proposition de loi qui va au-delà de la position européenne

Proposition de loi relative à la modernisation du congé de maternité en faveur de la protection de la santé des femmes et de l’égalité salariale et sur les conditions d’exercice de la parentalité, déposée par membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et apparentés : « La présente proposition de loi vise à apporter tout le soutien nécessaire à la proposition de la Commission européenne, d’augmenter la durée du congé maternité en modifiant la législation française dans le sens demandé par la Commission européenne. Il s’agit en outre d’améliorer les conditions de choix par le père, le conjoint ou la personne vivant maritalement avec la mère de l’enfant ou ayant conclu avec elle un pacte civil de solidarité, d’une prise de congé ou non. Celui-ci joue un rôle aussi fondamental dans l’accueil de l’enfant durant les premiers mois de sa vie. C’est ainsi l’amélioration de l’articulation entre la vie professionnelle, la vie personnelle et la vie familiale qui est poursuivie. Il s’agit de permettre les conditions d’un véritable choix pour les parents afin que la société soutienne pleinement les efforts auxquels ils consentent pour l’éducation de leurs enfants ».
Entre autres mesures, cette proposition envisage :

  • de faire passer le congé de maternité de 16 à 20 semaines ;
  • d'améliorer l'indemnisation de la salariée, par une indemnité à la charge de l'employeur quand le salaire dépasse le plafond de la sécurité sociale ;
  • de remplacer le congé de paternité par un congé d'accueil de l'enfant d'une durée de 14 jours (21 jours en cas de naissance multiple).

Au-delà de ces propositions précises, différents articles visaient à réformer en profondeur les congés liés à la naissance d'un ou de plusieurs enfants :

  • l’article 4 prévoit que l’ensemble des femmes exerçant une activité non salariée puissent bénéficier d’un congé maternité rémunéré qui prenne en compte leur besoin de remplacement dans leur entreprise ;
  • l’article 5 instaure la création d’un congé d’accueil de l’enfant, afin d’accorder deux semaines pleines de présence auprès de l’enfant et de la mère, du père, du conjoint, de la personne vivant maritalement avec la mère ou ayant conclu avec elle un pacte civil de solidarité ;
  • l’article 6 offre aux parents la possibilité de prendre un congé parental d’éducation alternatif. Inspiré de ce qui se pratique notamment dans les pays du nord de l’Europe, ce congé vise à impliquer les deux parents dans l’éducation de l’enfant. Il ne peut avoir une durée totale inférieure à 12 mois et supérieure à 36 mois ; 
  • l’article 7 propose d’améliorer les conditions faites aux parents choisissant de prendre un congé parental. L’objectif poursuivi est d’encourager la prise de ces congés par les couples en assimilant le congé parental à une période de travail effectif.

Ces dispositions ont été rejetées. Voici les arguments en défaveur du projet :

Mme Valérie Boyer:
( UMP)

« L’allongement du congé de maternité rencontre un certain nombre d’oppositions faisant valoir le risque d’accentuer la discrimination entre hommes et femmes dans leur progression professionnelle ».

Mme Isabelle Vasseur: (UMP)

« Les entreprises doivent s’impliquer davantage dans le développement de l’offre de garde. En revanche, je ne souscris pas à votre proposition de les amener à compléter le salaire de la salariée pendant son congé de maternité de vingt semaines, au-delà des 2 885 euros nets par mois versés par la Sécurité sociale. Il est évident que cette mesure, qui représenterait une charge très lourde pour les entreprises, serait totalement contre-productive. Elle nuirait à l’emploi des femmes et se retournerait contre la parité ».

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