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16 / 06 / 2016 | 39 vues
Xavier Berjot / Membre
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Les clauses de garantie d’emploi

Les clauses de garantie d’emploi peuvent être définies comme celles qui limitent le droit, pour l’employeur, de procéder au licenciement du salarié. Sources de nombreux litiges, elles impliquent souvent des enjeux financiers non négligeables.

Nature et portée des clauses de garantie d’emploi

a. Clauses du contrat de travail

Les clauses de garantie d’emploi peuvent être rédigées dans des termes différents, selon la durée de la garantie prévue contractuellement (1 an, 5 ans, sans limite,…) et selon leur portée (interdiction de licenciement « pure et simple », interdiction de licenciement sauf faute grave ou lourde…).

À titre d’exemples, la jurisprudence a admis la validité des clauses de garanties d’emploi suivantes :

  • la clause de maintien de l'emploi du salarié pendant une durée d'au moins 10 ans, l'employeur s'interdisant de le licencier pour quelque motif que ce soit, sauf faute grave (CA Paris 4 mars 1988, n° 87-31635) ;
  • la clause par laquelle l'employeur s'engage à ne pas rompre le contrat du salarié pendant 5 ans, sauf en cas de faute grave ou de force majeure (Cass. soc. 16 mai 1990, n° 87-40904) ;
  • la clause du contrat garantissant au salarié la stabilité de son emploi pendant une période de 5 ans (Cass. soc. 23 octobre 2007, n° 06-42994) ;
  • la clause stipulant que le contrat de travail est établi pour une durée minimum de 6 ans, pour garantir l’emploi d’un salarié jusqu’à sa retraite (CA Paris 14 octobre 2008, n° 06-13626).

Ces illustrations concernent des clauses de garantie d’emploi limitées dans le temps.

Cela étant, la Cour de cassation admet également, depuis longtemps, la validité des clauses de garanties d’emploi prévues sans limitation de durée (Cass. soc. 9 mai 1962, n° 60-40710).

Ainsi, est licite la clause octroyant une garantie d'emploi illimitée au salarié, à condition qu’il réalise un objectif de vente déterminé (Cass. soc. 20 mai 2009, n° 08-41606).

Quelle que soit la rédaction de la clause, la jurisprudence considère qu’elle ne fait pas obstacle au licenciement pour faute grave, pour faute lourde ou pour cas de force majeure (Cass. soc. 20 février 2007, n° 05-44309 ; Cass. soc. 30 mai 2000, n° 97-43191 ; Cass. soc. 10 juillet 2001, n° 99-44762).

En revanche, la clause de garantie d’emploi peut valablement avoir pour effet d’empêcher l'employeur de mettre le salarié à la retraite (Cass. soc. 23 septembre 2015, n° 13-28192).

b. Clauses des conventions collectives

Les conventions collectives prévoient parfois des clauses de garantie d’emploi au bénéfice du salarié.

Le plus souvent, elles s’appliquent en cas d’arrêt de travail pour maladie et ont pour objet d’interdire à l’employeur de licencier le salarié avant l’expiration d’une certaine période.

Par exemple, l’article 16 de la convention collective de la pharmacie d’officine prévoit que l’employeur ne peut pas licencier le salarié pour absence prolongée nécessitant de procéder à son remplacement définitif avant l’expiration des délais suivants :

  • 4 mois d'absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés ayant moins de 2 ans d'ancienneté,
  • 6 mois d'absence au cours des 12 derniers mois pour les salariés ayant 2 ans et plus d'ancienneté.

Plus rarement, les conventions collectives restreignent le recours à certains types de licenciement.

Tel est le cas de l’article 26 de la convention collective du personnel des banques dont l’alinéa 1er dispose, au sujet du licenciement pour insuffisance professionnelle :

  •  « Avant d'engager la procédure de licenciement, l'employeur doit avoir considéré toutes les solutions envisageables, notamment recherché le moyen de confier au salarié un autre poste lorsque l'insuffisance résulte d'une mauvaise adaptation de l'intéressé à ses fonctions ».

Enfin, la convention collective peut imposer à l’employeur de suivre une procédure particulière en cas de licenciement.

Ainsi, l’article 90 de la convention collective des sociétés d’assurance prévoit que le salarié d’au moins un an d’ancienneté, dont le licenciement pour faute est envisagé, dispose de la faculté de demander la réunion d'un conseil constitué de trois représentants de l'employeur et de trois représentants du personnel.

Le texte ajoute que la lettre de convocation à l'entretien préalable doit mentionner expressément cette faculté, le délai dans lequel elle peut être exercée ainsi que celle de se faire assister pour cet entretien conformément aux dispositions légales.

Les clauses de garantie d’emploi sont donc diverses, ce qui explique que leurs sanctions ne soient pas similaires.

Violation et sanction des clauses de garantie d’emploi

a. Clauses du contrat de travail

Lorsque la clause interdit à l’employeur de licencier le salarié avant « tel délai » ou pour « tel motif », le licenciement intervenu en violation de la clause engage la responsabilité de l’employeur.

Certaines clauses prévoient un montant forfaitaire payable au salarié en cas de violation de la clause (ex. : 10 000 euros, 6 mois de salaire…).

Pour la Cour de cassation, une telle disposition s’analyse en une clause pénale que le juge a le pouvoir de réduire s’il l’estime manifestement excessive, conformément à l’article 1152 du Code civil (Cass. soc., 15 avril 2015, n° 13-21306).

S’agissant du régime social des dommages et intérêts perçus par le salarié, la Cour de cassation juge qu’ils sont intégralement soumis à cotisations sociales.

En effet, les sommes versées à ce titre ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du Code général des impôts auquel renvoie l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, listant les indemnités de rupture du contrat de travail exonérées de cotisations de sécurité sociale (Cass. civ 2., 13 mars 2014, n° 13-12381).

Lorsque la clause de garantie d’emploi ne prévoit pas de montant forfaitaire, la Cour de cassation considère que sa violation, par l'employeur, oblige ce dernier à indemniser le salarié des salaires dus jusqu'au terme de la période de garantie (Cass. soc., 27 octobre 1998, n° 95-43308).

Précisons que les indemnités pour violation de la clause de garantie d’emploi se cumulent avec :

  • l’indemnité légale, conventionnelle ou contractuelle de licenciement (Cass. soc., 30 juin 2010, n° 08-41937 ; Cass. soc., 26 septembre 2012, n° 11-20194) ;
  • l'indemnité de préavis (Cass. soc., 13 novembre 2008, n° 07-42640) ;
  • l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 23 septembre 2015, n° 13-28192).

b. Clauses des conventions collectives

La sanction est différente concernant les clauses des conventions collectives interdisant à l’employeur de licencier le salarié avant l’expiration d’un délai déterminé ou lui imposant de respecter une procédure particulière (cf § 1).

La Cour de cassation considère que leur inobservation prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Tel est le cas du non-respect de l’article 90 de la convention collective des sociétés d’assurance prévoyant la tenue d’un conseil contradictoire en cas de licenciement pour faute (Cass. soc., 18 octobre 2006, n° 03-48370).

Tel est également le cas du licenciement pour absence prolongée notifié à un salarié en arrêt de travail, alors que la période de garantie d’emploi n’a pas expiré (Cass. soc., 18 novembre 1997, n° 95-43395).

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