Responsabilité des gestionnaires publics: enfin du nouveau sur un dispositif d'assistance
Dans le prolongement d'un groupe de travail qui s'est tenu fin novembre, notre syndicat vient de prendre connaissance e la note de service de la Direction Générale des Finances Publiques du 10/12/2025 relative au dispositif d’assistance et de soutien mis en place pour accompagner les agents, soit en tant que mis en cause, soit en tant que témoins, dans le cadre de la RGP (Responsabilité des gestionnaires publics) dite juridictionnelle.
TOUT VIENT À POINT À QUI SAIT ATTENDRE...
Cette note attendue depuis plus d’un an, puisque annoncée dans une journée d’études GP du 5/12/24.
Pas aidée par le retard à l’allumage de la Direction des affaires juridiques (DAJ) du Secrétariat Général (SG) de Bercy, ne sort que maintenant...
Entre temps cinq collègues ont été mis en cause (sur un total de 6 depuis le 1/1/2023). Cette note est la déclinaison de la note du Secrétariat Général de Bercy du 14/11/2025.
Il est affligeant de voir le temps pris pour sortir le cadre de ce dispositif qui aurait pu sortir dès le printemps 2024 ! (cf note de la secrétaire générale du gouvernement du 2/4/24 indiquant clairement que la protection fonctionnelle n’était pas applicable à la RGP).
La piqûre de rappel de la circulaire Bayrou du 17/4/25 réaffirmant l’absence de protection fonctionnelle devant la Cour des comptes et demandant aux administrations d’organiser en interne l’accompagnement des agents mis en cause aurait du booster les choses, eh bien non !
Il aura donc fallu 7 mois au SG de Bercy et 1 mois de plus pour la transformer en note de service DGFiP : en matière de réactivité, on fait mieux !
À savoir que près d’une vingtaine d’agents ont sollicité la mission Responsabilité, doctrine et contrôle interne comptables (MRDCIC) depuis le 1/1/23 et vraisemblablement davantage ont été questionnés par les magistrats instructeurs lors d’instructions.
Au delà de la procédure expliquée, nous attirons l’attention sur le fait que si l’agent entendu, en tant que témoin ou en tant que mis en cause a, de son coté, un avocat (qu’il paiera de ses deniers propres ou via une assurance privée), il peut néanmoins recourir au dispositif mis en place par la DGFiP, les deux démarches pouvant être complémentaires.
Autre chose évidente, mais qu’il convient de rappeler : lorsque les faits en cause relèvent manifestement d’une faute personnelle détachable du service, l’assistance ne sera pas accordée.
Cette note soulève plusieurs questions :
- La mission Responsabilité, doctrine et contrôle interne comptables (MRDCIC), malgré la qualité reconnue de son appui aux collègues, aura t-elle les moyens suffisants et l’autorité nécessaire (auprès des directions locales ou des Établissements Publics Nationaux (EPN) ou toute autre structure hors DGFiP employant des agents DGFIP) pour réaliser ce soutien ?
- L’articulation entre les différents intervenants (DAJ-Direction des affaires juridiques- , SG Bercy, directions locales, bureaux métiers, MRDCIC, éventuellement avocats privés) ne fera-t-elle pas courir un risque de forclusion de l’action ?
- La personne de la MRDCIC en charge du dossier de l’agent mis en cause ne pouvant pas participer aux débats, un agent appuyé d’un avocat n’est-il pas avantagé puisque ce dernier peut assister à une audition avec le magistrat instructeur et, bien sur, représenter son client à l’audience publique à la Cour ?
- L’assistance juridique et métier par la MRDCIC est une chose, mais quid de l’assistance psychologique en phase d’instruction et de jugement ?
En effet, les témoignages recueillis d’agents entendus en tant que témoins ou mis en cause montrent que cette procédure peut être extrêmement déstabilisante psycho- logiquement et loin d’être anodine et insignifiante dans une carrière. Se voir ainsi reprocher son manque de professionnalisme ou son manque de loyauté n’est pas très agréable.
Notons que les éléments de langage ont changé depuis 2 ans et un changement de Directeur Général.
Finie la douce « mélodie de Jérôme » sur un simple ajustement technique qui ne devait apporter que du bonheur aux agents de la DGFiP : « Il n’y a aucune raison de craindre les conséquences de la réforme, bien au contraire » (courriel du DG à tous les agents le 17/2/23).
Place désormais à la contrition avec une Directrice Générale qui sonne la révolution culturelle : « L’entrée en vigueur du régime de la RGP marque un changement culturel important qu’il nous faut accompagner au sein de notre réseau ».
Comme disait Montaigne : « Il n’y a que les fols certains et résolus. »
RGP ET PROTECTION FONCTIONNELLE : UNE VICTOIRE ...
Les fonctionnaires mis en cause dans le cadre de la RGP pourront bientôt bénéficier de la protection fonctionnelle.
Un article d’Acteurs Publics du 8/12/25 précise que la ministre de l’Action et des Comptes publics a donné son feu vert à l’octroi de la protection fonctionnelle aux gestionnaires publics mis en cause dans le cadre de la RGP.
Cette mesure pourrait aboutir via une future «disposition législative» dont les contours restent encore à définir. Espérons que cette fois ci sera la bonne?
Nous avons mis en doute dès 2022 la bonne parole de la DGFiP sur l’applicabilité de la protection fonctionnelle à la RGP.
Elle allait même à cette époque jusqu’à jurer la main sur le coeur en CSAR (Comité social d'administration et de réseau) le 16/10/23 que la protection fonctionnelle s’appliquerait sans problème dans le cadre de la RGP.
Nous avons continué à porter seuls cette nécessité de protection fonctionnelle, et notamment auprès de la ministre en mars 2025 et nous l’avons constamment réitéré auprès de la Directrice générale depuis, tant en bilatérale que lors du dernier groupe du travail sur le sujet du 26/11/25.
Ce serait donc une belle victoire venant récompenser la pugnacité depuis 3 ans de notre syndicat sur ce sujet ô combien sensible .
NOTRE SYNDICAT A SAISI LES SERVICES DE LA DGFIP
Plusieurs de nos collègues, comptables de SGC ( services de gestion comptables) , nous ont fait remonter le courriel reçu de la mission RDCIC (Mission Responsabilité, doctrine et contrôle interne comptables) le 4 décembre, relatif à la proposition par plusieurs assureurs aux collectivités locales de contrats de groupe (collectifs) permettant d’assurer la protection juridique des élus et agents en cas de mise en cause devant le juge financier.
La DGFiP invite les comptables à déconseiller à leurs ordonnateurs de souscrire ce type de contrats collectifs d’assurance offrant une protection juridique aux élus et aux personnels de la collectivité locale, aux motifs d’une possible mise en cause de ces ordonnateurs pour octroi d’un avantage injustifié accordé à autrui ou à soi-même par intérêt personnel.
Notre syndicat a donc saisi le 8/12/25 les services compétents de la DGFIP afin de lever toute ambiguïté quant à la possibilité de souscrire ou non par une collectivité territoriale à ce genre de contrat.
Pour nous , les comptables publics doivent pouvoir exercer leur visa de la façon la plus sereine qui soit, face à des ordonnateurs s’estimant dans leur bon droit.
Heureusement, la DGFiP a reconnu que les collègues s’interdisent toute démarche liée à l’opportunité de l’action des collectivités locales.
Nos exigences:
- une intégration la plus rapide possible des incidences de la RGP, par le véhicule législatif le plus approprié, dans la loi de 1983 sur la protection fonctionnelle.
- que les personnels puissent se prémunir contre le risque d’être condamnés par la Cour des comptes à payer une amende non assurable et non rémissible et à subir des frais d’avocat se chiffrant en milliers d’euros en dehors, pour l’instant, de toute protection fonctionnelle ;
- un régime indemnitaire des agents de la DGFiP qui doit clairement évoluer pour intégrer ce risque RGP ;
- une refonte totale de l’ordonnance de mars 2022 qui aboutit à une sclérose de l’action publique financière.