La démocratie sociale va de paire avec la démocratie politique
Le constat selon lequel la démocratie dysfonctionne est aujourd’hui assez largement répandu. Au plan politique les citoyens se sentent mal représentés, considèrent souvent que les partis de la gauche et de la droite républicaines, après avoir tenu des politiques économiques très semblables, se trouvent aujourd’hui écartelés entre les extrêmes. Certains partis n’en sont plus réellement, les adhérents par clic remplaçant les cotisants qui, eux, peuvent peser sur les choix du parti. Ils s’effacent derrière des mouvements rendus à un fonctionnement autocratique.
Parmi les raisons de cette situation, outre l’absence déjà évoquée de politiques économiques et sociales alternatives, la différence se faisant sur le sociétal, la mise en place du quinquennat avec la conjonction des élections présidentielle et législative a conduit à un renforcement du pouvoir élyséen (avec aussi un éloignement) et à un affaiblissement de l’Assemblée nationale où les gesticulations et l’hypocrisie tendent souvent à l’emporter sur le fond.
Au plan social la démocratie s’est aussi beaucoup affaiblie ces dernières années avec un exécutif qui ne croit pas au « dialogue social » considéré au niveau national comme une perte de temps et une usurpation du pouvoir exécutif.
Le cas le plus visible et symbolique est celui de l’assurance chômage où depuis 2018 l’exécutif fait tout pour étatiser le système, employant des mesures autoritaires comme les lettres de cadrage et le remplacement de cotisations salariales par l’impôt CSG. In fine c’est le paritarisme qui disparait.
Or celui -ci est une école de responsabilité et son effacement ne peut conduire à terme qu’à des tensions et une politisation du mouvement syndical.
La volonté de ponctionner financièrement les caisses de retraite complémentaire relève de la même logique.
Il ne s’agit pas d’exonérer de leur responsabilité les partenaires sociaux et de ce point de vue l’échec de la négociation sur l’emploi des seniors est une faute servant l’exécutif, mais il faut aussi revoir les conditions des relations avec l’exécutif. C’est notamment le cas pour l’article L1 du code du travail qui oblige un gouvernement à solliciter réellement les partenaires sociaux quand il veut toucher au code du travail. Il faudrait en élargir l’application, s’en tenir aux documents d’orientation et non aux lettres de cadrages corsetées et pouvoir interdire un projet de loi (et non une proposition de loi) qui recueillerait un avis négatif et formalisé des partenaires sociaux.
La démocratie sociale va de paire avec la démocratie politique, elles sont les deux faces de la même pièce. Quand elles dysfonctionnent les risques de tension, d’incompréhension et d’éloignement augmentent, avec le danger de voir les populistes au pouvoir.