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La Sécurité sociale : les leçons de Jacques Dutronc
Pour Michel Monier, Ancien Directeur général adjoint de l’UNEDIC et membre du Think Tank CRAPS ( Le Cercle de Recherche et d’Analyse sur la Protection Sociale) ..."La Sécu n’a jamais su « planquer ses sous », elle les distribue à un public toujours plus nombreux quitte à donner moins à chacun et sous condition de ressources "...
La Sécurité sociale fête ses 80 ans, Dutronc ses 82 ans. L’une et l’autre en ont connu des succès et péripéties ! La première s’est appliquée à faire toujours plus, à « toujours retourner sa veste du bon côté… », celui de l’universalité. Elle s’est faite prodigue jusqu’à ce que la veste de la protection sociale, « tellement retournée, craque de tous les côtés ». Le second a creusé son sillon, fidèle à lui-même, quitte à surjouer le rôle du dandy nonchalant provocateur sans jamais, finalement, « retourner sa veste ». Jacques a dit, dès 1980, « j’ai déjà donné », la Sécu aurait dû le dire dès 1981, quand l’OCDE alertait sur la crise de l’État-providence !
L’anniversaire de la Sécu se fête, jusqu’ici, à bas bruit… forcément, il s’agit, une fois encore, de la réformer pour satisfaire l’ardente obligation d’économiser. Dutronc sera fêté par une Symphonique Célébration… Il est ce qu’il a été, la Sécu de 2025 n’est plus ce qu’elle était dans ses jeunes années, elle ne l’est plus, mais s’entête à rester accrochée au mirage de son financement « sur le travail » et à affirmer encore son ambition d’universalité. La Sécu n’a jamais su « planquer ses sous », elle les distribue à un public toujours plus nombreux quitte à donner moins à chacun et sous condition de ressources : voilà le paradoxe de l’universalité ! Ce sont ses financeurs qui, aujourd’hui, disent « on a déjà donné ».
Parce qu’il faut la réformer, parce qu’elle n’est pas un cadeau telle « la fille du père Noël, tombée là par hasard » il ne suffit plus de se satisfaire de reparamétrer, une fois encore, tel ou tel de ses dispositifs. La Sécu, ce « petit jardin qui sentait bon » non pas le métropolitain, mais l’heureux compromis du CNR, doit aujourd’hui être mise dans les mains de nouveaux promoteurs qui reconstruiront le tout, selon les règles communautaro-sociales d’aujourd’hui, en différenciant les volets « sociaux » et « assurantiels ». La mixité sociale, la survie de l’universalité de la protection sociale, est à ce prix : celui de la distinction entre solidarité et assurance sociale.
La première financée par l’impôt ou la taxe, la seconde par les cotisations, des employeurs et des salariés, sur le travail. Refuser de reconstruire la protection sociale sur des fondations différenciant « solidarité » et « assurance » c’est accepter de ne pas comprendre, toujours avec Jacques Dutronc que, parce qu’il l’aide à s’endormir, « Derrick n’a pas été remboursé par la Sécu ». Ne pas différencier solidarité et assurances socialesc’est accepter aussi que la Sécu continue de satisfaire tous les « et moi, et moi, et moi », mais c’est, surtout, ne pas voir que la société aujourd’hui n’est pas celle de 1945 ni que le mode de production fait de moins en moins de place au travail, même si l’emploi salarié augmente.
Les totems de 1945 n’ont plus de socle, il faut finir de les « détricoter » (là, la leçon n’est pas de Jacques Dutronc, mais de Denis Kessler).
La famille-CNAF, la santé-CNAM sont-elles aujourd’hui encore des assurances sociales qui doivent être financées à plus de 60 % par des cotisations sociales ou sont-elles de la solidarité générationnelle à financer par tous, pour chacun, par la fiscalité ?
La valeur ajoutée créée par « le robot » substitué au travail doit-elle échapper au financement des assurances sociales ?
Les actifs ont raison de s’approprier le « Qui se soucie de nous ? », du Dutronc de 1987.
Le qui se soucie d’eux se reformule : le travail doit-il financer la solidarité ?
À ne pas répondre à la question, le filet de protection des assurances sociales finira hamac de la solidarité : on s’y reposera, mais de façon précaire.
- Protection sociale parrainé par MNH
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Sécurité sociale : La pérennité du système en question
Dans le rapport qu'elle vient de rendre public, la Cour des comptes tire le signal d'alarme ; elle considère que la pérennité du système est menacée à court terme.
Les principaux éléments à retenir :
Selon: https://www.banquedesterritoires.fr/securite-sociale-la-perennite-du-systeme-est-menacee-court-terme-pour-la-cour-des-comptes?pk_campaign=newsletter_quotidienne&pk_kwd=2025-05-27&pk_source=Actualit%C3%A9s_Localtis&pk_medium=newsletter_quotidienne
Les "déficits successifs et croissants" de la sécurité sociale et l’évolution du financement de la dette sociale font courir, dès 2026, le risque d’une crise de liquidité et menace "à court terme" la pérennité du système, alerte la Cour des comptes dans son rapport 2025 sur la sécurité sociale.
La prise en charge des nouveaux déficits repose en effet sur une part croissante d’emprunts de courte durée contractés par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), sur un marché financier limité.
La Cour des comptes appelle donc à conduire des réformes d’ampleur pour sauver notre modèle de solidarité et à renforcer l’efficacité des services financés par la sécurité sociale.
Elle préconise en particulier de doter la branche Autonomie des "leviers pour faire face aux conséquences du vieillissement de la population", à travers la définition d’une trajectoire financière tenant compte des besoins "après 2030" et le remplacement de l’APA (allocation personnalisée d’autonomie, attribuée par les départements) par une "prestation de sécurité sociale" versée par la CNSA.
pour plus de détails:
Branche famille de la SSS: un investissement pour l'avenir !
L a branche famille de la Sécurité sociale est issue d’un long processus historique.
Dès 1918, des industriels créent des caisses de compensation, ancêtres des CAF, afin de verser des compléments familiaux aux travailleurs ayant la charge d’une famille. Ces sursalaires se développent dans toute la France, dans un double objectif : fidéliser les salariés et contenir les revendications salariales.
En 1932, la loi Landry généralise le principe de sursalaires familiaux pour tous les salariés de l’industrie et du commerce ayant au moins deux enfants. L’adhésion des employeurs à une caisse de compensation devient obligatoire. On assiste alors à la première généralisation des allocations familiales.
Plusieurs décrets-lois (1) viendront par la suite poser les bases de la branche famille, notamment en posant le principe d’allocation progressive (dissociée du salaire) selon la taille de la famille et versée quel que soit le revenu avec un taux uniforme (principe d’universalité des prestations).
En 1945, l’ordonnance fondatrice de la Sécurité sociale reconnaît un droit universel à garantir les charges de famille.
Les CAF sont ainsi créées, mettant fin au monopole patronal pour la gestion des caisses.
Aujourd’hui, cette branche concerne 33,1 millions d’allocataires, 95,5 milliards d’euros de prestations (2).
Sont notamment financés : les allocations familiales, les crèches, les centres sociaux, les aides au logement, le soutien à la parentalité.
Ses missions ?
Aider les familles dans leur vie quotidienne en facilitant l’articulation vie familiale et professionnelle ; améliorer le cadre de vie des allocataires et développer la solidarité envers les plus vulnérables. Pourtant depuis plus de trente ans, la branche ne cesse d’être fragilisée : baisse et remplacement des cotisations par des recettes fiscales (3) , fin du principe d’universalité des prestations (4) .
L’effet de ces politiques, rompant avec les fondamentaux issus du Conseil national de la Résistance, c’est un taux de natalité en berne avec 1,68 enfant par femme en 2023, un record depuis la Seconde Guerre mondiale.
C’est par son positionnement constant de défense des familles et des allocataires que FO est la première organisation syndicale en matière de présidence des CAF.
Afin de retrouver une branche qui joue pleinement son rôle, notre organisation syndicale revendique :
‒ le retour du financement de la branche par la cotisation et la fin des diminutions de ses recettes ;
‒ le retour du principe d’universalité des prestations. Les allocations familiales ne sont pas un instrument de redistribution mais une aide à la famille et à la démographie ;
‒ l’augmentation des minima sociaux et des allocations familiales ; ‒ une véritable politique ambitieuse en matière de petite enfance ;
‒ l’abrogation de toutes les dernières réformes portant atteinte aux droits des allocataires : réforme de calcul des APL, réforme du RSA…
Pour nous , la branche famille n’est pas une charge mais un investissement d’avenir ! Secteur de la protection sociale collective Secteur de la protection sociale collective
1) Du 12 novembre 1938 et du 29 juillet 1939. )
2) ,La politique familiale mobilise entre 2,7 % et 4,7 % du PIB, soit l’un des taux les plus importants au monde.
3) Entre 2014 et 2022, diminution de 15,4 % des recettes nettes de la branche famille, venant affaiblir son autonomie financière.
4) Abrogé par la LFSS pour 2015.