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04 / 10 / 2019 | 244 vues
Claude Pichot / Membre
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Lubrizol Rouen : le déni des accidents impossibles a encore frappé

« Le pire n’est jamais sûr, mais il survient toujours… »
 

Lubrizol Rouen : « Les odeurs que nous sentons sont effectivement dérangeantes, pénibles, mais elles ne sont pas nocives. C'est ce que me disent les scientifiques et les techniciens ».


En voulant rassurer, le Premier Ministre a laissé planer le doute. Six jours pour annoncer que cinq mille deux cent soixante et une tonnes issues de quatre cent-soixante-dix-neuf produits différents ont brûlé sur un site Seveso seuil haut ! On s'étonnera aussi que le risque incendie et ses conséquences sanitaires n'aient pas fait l'objet d'évaluations de la part de l'exploitant et de l'inspection des sites classés Sesveso. Ce qui laisse à penser que la composition des gaz de combustion n'a jamais été évaluée avant l'incendie. Comment alors prévenir les risques qu'on ne connaît pas ?
 

C'est encore une fois le déni des accidents impossibles qui a frappé. L'usine Lubrizol site Seveso seuil haut a brûlé alors que cet événement n'a pas été pris en compte dans l'étude des risques. Et ce n'est pas l'étude que l'INERIS va diligenter à postériori à la demande de la Ministre de la santé qui rassurera les habitants des zones survolées par le nuage de fumées…


La question aujourd'hui n'est pas de connaître l'origine de l'accident et les responsabilités, il le faudra pour savoir à qui incombe la réparation des dommages, mais bien de connaitre les différents produits qui ont brûlé et ont été dispersés sur les communes avoisinantes et les quantités concernées. Et d'en tirer rapidement les conséquences pour les autres sites Seveso.
 

Le plan de prévention des risques technologiques (PPRT) de Lubrizol datait du 31 mars 2014. Et il est avéré, avec l'accident du 26 septembre 2019, que le périmètre d'exposition aux risques n'avait pas prévu les conséquences de la combustion de plus de 5000 tonnes de produits. Pas plus qu'il n'avait prévu les conséquences des réactions chimiques entre ces produits. L'impact de cet accident majeur ne s'est pas limité à l'environnement immédiat de l'usine comme le prévoyait le PPRT de mars 2014, il s'est étendu à plusieurs dizaines de kilomètres du site sous l'effet des vents dominants.


Connaître les résultats de l'étude de dangers réalisée par Lubrizol en apprendra plus. Mais on découvrira que les conséquences de l'accident survenu le 26 septembre n'ont pas été étudiées car la probabilité d'occurrence de cet événement avait été jugée trop faible (une fois tous les dix mille ans !)

La loi sur les risques technologiques doit changer


C'est sur ce point que la loi sur les risques technologiques doit changer sans attendre le prochain accident car plus de 1100 sites Seveso sont concernés.
 

La loi doit préciser que le risque de survenance d'un accident majeur lié à l'incendie et à la combustion de mélange des produits présents sur un site Seveso doit être pris en compte et confier à l'INERIS le soin d'y veiller.


A partir des données fournies par l'étude des dangers établie par l'exploitant, et en concertation avec lui, l'INERIS :

  • procédera à l'étude de la combustion des mélanges de produits présents sur un site à risque SEVESO et déterminera les produits de combustion, leur concentration et leur dangerosité pour les personnes et l'environnement.
  • définira la zone d'influence du nuage de fumées à partir de direction et de l'intensité des vents dominants sur la base des données de la Météorologie nationale.
  • étudiera la concomitance de l'accident avec des pluies dans la zone de l'accident en vue de déterminer la dangerosité les eaux pluviales
  • évaluera les conséquences sanitaires et économiques de l'accident majeur.


Ces études devront préciser :
 

  • les mesures de prévention et de protection des travailleurs du site, des intervenant externes au site lors de l'accident (pompiers, police, autorités publiques.),
  • les mesures de prévention et de protection des populations présentes dans la zone d'influence atmosphérique de l'accident
  • les dispositions à prendre sur les réseaux d'eaux usées en cas de pollution des eaux de pluie
  • les prélèvements, les analyses et les mesures à effectuer pendant l'incendie (air, eau, température, etc.)
  • les mesures de suivi sanitaire des populations exposées (sur le site et dans la zone d'influence de l'accident)
  • les mesures de suivi sanitaire concernant les produits agricoles, l'élevage et les produits issus de l'élevage dans la zone d'influence de l'accident)
     

En complément des études sur la combustion des mélanges de produits, l'interaction des produits présents sur le site avec les produits utilisés pour combattre les incendies sera étudiée afin de déterminer la dangerosité des mélanges stagnant sur le sol au cours de l'intervention des pompiers.

Seront précisés :
 

  • la toxicité de ces effluents post accident
  • les mesures de prévention et de protection des travailleurs du site, des intervenant externes au site lors de l'accident (pompiers, police, autorités publiques.),
  • les moyens de confinement et de retenue de ces effluents pour éviter tout rejet dans l'environnement
  • es moyens de pompage et d'évacuation de ces effluents dangereux

Rétablir la confiance dans la parole publique


Au-delà de ce que l'évolution de la loi sur les risques technologiques permettra de faire sans attendre de nouveaux accidents, la question de la confiance dans la parole des autorités publiques reste posée en cas d'accident.
Pour éviter à l'avenir les polémiques et les commissions d'enquêtes, il est grand temps de créer le Bureau d'enquête accidents industriels sur le modèle des Bureaux d'enquête accidents existants (Sécurité de l'aviation civile, Transports terrestres, Evénements de Mer, Sécurité aéronautique d'Etat.

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