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Délit d’entrave et récupération des heures de délégation
Dans un arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 26 janvier dernier (Cass. crim., 26 janvier 2016, n° 13-85770), les hauts magistrats condamnent un employeur pour entrave aux fonctions de délégué syndical et de délégué du personnel.
En l’espèce, un salarié, travailleur de nuit, membre de la délégation unique du personnel puis délégué syndical, n’a jamais bénéficié du paiement des heures de délégation effectuées en dehors du temps de travail. L’employeur lui imposait la récupération de ces heures à des jours fixes.
Selon l’employeur, un usage dans l’entreprise ainsi que l’article 33-5 de la convention collective des casinos du 29 mars 2002 lui permettaient d’imposer des journées de récupération en contrepartie des heures de délégation réalisées plutôt que de les rémunérer.
Le tribunal correctionnel puis la Cour d’appel ont condamné l’employeur pour entrave aux fonctions de délégué syndical et de délégué du personnel rejetant l’argumentation de l’employeur : « S’agissant des heures de délégation prises hors du temps de travail, les représentants du personnel concernés bénéficient, selon l’article 18 bis de ladite convention, soit d’un repos compensateur correspondant au temps de l’absence rémunéré par l’employeur, soit d’un paiement des heures conformément aux dispositions légales dans la limite du nombre d’heures prévu par ce texte ».
De plus, les juges du fond ont considéré qu’en choisissant systématiquement d’imposer des dates de repos compensateur malgré l’opposition du salarié et l’avertissement de l’inspection du travail, l’employeur « a éloigné l’intéressé de l’entreprise dans laquelle il travaillait principalement la nuit, entravant sciemment ses fonctions de délégué du personnel, puis celles de délégué syndical ».
L’employeur a formé un pourvoi contre l’arrêt rendu par la Cour d’appel. Ce dernier a été rejeté par la Haute Cour. La chambre criminelle a approuvé l’analyse des juges du fond : « Attendu qu’en l’état de ses énonciations et dès lors que les dispositions précitées, seules applicables, aménagent, au bénéfice des représentants du personnel concernés, un droit de choisir entre deux modes de compensation des heures de délégation prises hors du temps de travail, la violation de ce droit caractérisant l’entrave reprochée, la Cour d’appel a justifié sa décision ».
Ainsi, selon les hauts magistrats, ladite convention collective instaure au bénéfice des représentants du personnel un véritable droit d’option, celui de choisir entre les deux modes de compensation prévus.
Par conséquent, l’employeur qui impose au salarié réclamant le paiement de ses heures de délégation la récupération de celles-ci à jours fixes commet nécessairement un délit d’entrave.