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14 / 02 / 2013 | 2 vues
Denis Maillard / Membre
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L’observatoire des suicides, ça y est : Marisol Touraine d'accord avec le CESE et « l'appel des 44 »

Ce n’est pas tous les jours qu’un avis du CESE est repris par l’exécutif. Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales et de la Santé, a ainsi annoncé la création d’un observatoire national des suicides à l’issue de l’avis voté par l’institution le 12 février. Symbole d’un gouvernement soucieux d’être en prise avec la représentation de la société civile et l'urgence sociale que représente le phénomène suicidaire en France. L'immolation d'un chômeur devant une agence Pôle Emploi à Nantes le mercredi 13 février nous l'a encore rappelé.

« L’observatoire devrait permettre de croiser les données existantes et diligenter des études pour en savoir plus, sur un plan qualitatif notamment », explique Didier Bernus, membre du groupe FO et rapporteur de cet avis du CESE en faveur d’une prévention active des suicides (auto-saisine en avril 2012). L’occasion de mieux identifier les facteurs de risques économiques, sociaux, organisationnels, neurologiques alors que la France affiche un taux de suicide de 14 pour 100 000, contre 10 pour 100 000 en moyenne dans les autres pays européens. Espace de centralisation et de compréhension des données disponibles, l’observatoire devrait favoriser une approche pluridisciplinaire (disciplines de la santé publique, médecine du travail) sur tous les terrains (vie privée, vie professionnelle). « Nous n’avons pas idée de l’onde de choc, tant sociale qu’économique, des 11 000 suicides et des 220 000 tentatives annuels. D’où l’impérieuse nécessité de mieux connaître les sources multifactorielles des conduites suicidaires », affirme Jean-Claude Delgnes, directeur général de Technologia, à l’initiative depuis près de deux ans d’un appel à la création d’un observatoire, signé par 3 000 personnes et soutenu par les représentants des confédérations syndicales, des DRH ou encore de la Mutualité Française.

Idées reçues et raccourcis


Un observatoire, c’est l’opportunité de clarifier les messages et d’en finir avec des idées reçues qui freinent les démarches de prévention inscrites dans la feuille de route de la ministre des Affaires sociales et de la Santé. Le cliché le plus communément répandu consistant à penser que les conduites suicidaires sont l’œuvre de personnes fragiles. « Ce sont les sources de la fragilisation qu’il faut chercher. On passe à côté de la fragilisation en se focalisant sur la fragilité », rectifie le professeur Michel Debout, président de l’Association bien-être et société, qui milite aux côtés de Technologia. Comme l'a rappelé la ministre devant le CESE, le suicide n'est pas seulement un drame personnel et pour les proches, c'est avant tout un fait social grave.

Les travaux de l’observatoire devraient aussi permettre d’éviter les raccourcis lorsqu’il s’agit de faire porter la responsabilité d’un suicide. « Même une lettre posthume ne suffit pas à expliquer un geste suicidaire », a souligné la psychiatre Marie France Herigoyen à l’occasion du colloque consacré à « l’onde de choc du suicide », qui se tenait le 4 février dernier à l'Assemblée nationale à l'initiative de Technologia et de l’Association bien-être et société, sous le patronage du Président de la République. Se donner les moyens de comprendre le « scénario de l’acte » passe nécessairement par un travail d’enquête approfondi. En particulier quand le drame survient dans un cadre professionnel. « Il ne sert à rien d’invoquer immédiatement la responsabilité pénale pour mettre la pression sur la direction. Les personnes susceptibles de s’exprimer vont se refermer sur elles-mêmes. Tout ce qui arrive aux salariés engage l’employeur mais l’entreprise ne peut pas tout », affirme Jean-Christophe Sciberras, président de l’ANDRH qui concède « voir son rôle de DRH de façon différente depuis 2007 ». Une période qui correspond à son passage à la DRH du Technocentre de Renault pour mettre en route un plan d’amélioration des conditions de travail après une série de suicides. « Le DRH, qui été trop souvent instrumentalisé, doit mobiliser sa capacité d’impertinence positive », considère Jean Kaspar, expert du dialogue social et auteur du rapport sur les conditions de travail à La Poste. De la nécessité de ne pas réduire l’entreprise à un simple actif financier. D’autant plus que la dernière enquête de la Fondation de France révèle qu’en 2012, 27 % des salariés (contre 20 % en 2010) « disent ne pas être en mesure de construire des relations autres que strictement professionnelles avec leurs collègues ».

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